La Soudaine Apparition de Hope Arden

Claire North, Editions Delpierre, 2016, 560 p., 13€ epub sans DRM

 

Si vous étiez invisible, que feriez vous ? Le Bien ou le Mal ?

Difficile de tenir le lecteur en haleine avec le Bien. Va pour le Mal alors !
Une très bonne idée de départ desservie par une forme maladroite et un fond superficiel. 
Un paragraphe bien gnangnan et sirupeux en début de lecture, de quoi refroidir même un Bisounours :

"Tous les chagrins que vous éprouverez jamais ont déjà été éprouvés par d’autres humains avant vous, et seront éprouvés par d’autres humains à venir. Il est impossible de s’y préparer ou d’atténuer la douleur, mais pour ce que ça vaut, madame, vous devez savoir que toute l’humanité qui fut, qui est et qui sera vous accompagne en ce moment.
Je souris, le remerciai et m’enfuis avant qu’il me voie commencer à pleurer."


Le pitch : Perfection, une sorte de Siri / Google now dont l'unique objectif est de vous faire atteindre la perfection. Il connait tout de vous, même si vous avez coché les clauses de confidentialité. Tous vos déplacements, loisirs, courses, travail sont analysés, traités et Perfection vous conseille la bonne marche à suivre pour atteindre l'élite mondiale du sourire ultrabright et  de la peau tannée par les meilleures UV de la planète. Mais gare à vous si vous décidez de ne pas suivre ses conseils ou avez un compte en banque un peu juste.
Mais Perfection croise sur sa route Hope Arden, jeune femme qui souffre d'invisibilité. Vous l'oubliez dès que vous détournez le regard. Et Hope a l'espoir que cela change.

Le sujet du livre avait tout pour m’intéresser : les conséquences des nouvelles technologies, dont les suggestions et l'anonymat d'internet, sur nos modes de vie. Une déclinaison du concept d'invisibilité sociale dans nos sociétés, une interrogation sur la conformité, la société.
Mais cela ne fait pas tout. Des personnages, interactions binaires : la solitaire fuyant la solitude; le frère qui corrompt le projet de sa sœur; la voleuse tombant amoureux du policier qui la traque, un méchant pas si méchant... Ajouter y les états d'âmes fluctuants et tirants en longueur de l'héroïne.
Pas d'analyses poussées sur le web, pas d'explications scientifiques. Sur les réseaux, je vous conseille le très bon Les affinités de Robert Charles Wilson.

La forme maintenant. Catherine Webb nous parle du World Wide Web, construit son récit comme une séance de surf : on passe d'un événement à un autre, du passé au présent, d'un lieu à un autre (le tour du monde ! L'auteur a reçu un Globe terrestre en cadeau à Noël ?). Bonne idée mais qui cache malheureusement une intrigue faiblarde. L'auteur doit s'en apercevoir, revient à la moitié du livre à un récit chronologique et tente de relancer l'histoire en basculant dans l'espionnage.
Pour faire bonne figure, entrecoupez les paragraphes de mantras, aphorismes digne de la méthode Coué, et donnez la définition de chaque mot (l’héroïne ayant passé une partie de sa vie dans une bibliothèque !)
Je comprends la démarche de l'auteur mais cela n'a pas fonctionné sur moi.
Trop de gnangans. Trop de bons mots (voir plus bas). Trop de politiquement correct. Trop de visites. Trop de superficialités.Trop de religiosité.
Hope Arden est une voleuse-hackeuse sans scrupule. Un autre personnage rappelle le courant anarchiste insurrectionnel. Un pamphlet anarchiste contre la société ? Non, rassurez vous, à la fin, la morale est sauve. Ouf !
Ceci dit, Catherine Webb a atteint son but, trois jours plus tard, j'avais déjà tout oublié de l'histoire de Hope Arden. Comme quoi, il y a une chance pour les mauvais souvenirs.
J'avais adoré Les quinze premières vies d'Harry August, j'ai détesté La Soudaine Apparition de Hope Arden.



Qu’est-ce que la connaissance ? C’est l’inspiration. C’est un appel aux armes. C’est un rappel qu’il n’est rien qui ne puisse être accompli. C’est l’humanité sous toutes ses formes

– Je tiens un blog.
– Il me semble l’avoir lu.
– Vraiment ? Je n’ai pas tant de lecteurs ; vous devriez m’être précieuse. Trop de voix qui résonnent en même temps sur le Net, trop de cris, des cris tout le temps. Parfois, c’est difficile de se faire entendre. Parfois, il me semble que le monde entier hurle.

Je pensais que son assurance n’était qu’un masque, un bouclier pour se protéger de son propre chagrin, mais je vois maintenant que sa surface est sa seule vérité, qu’il n’y a aucune profondeur cachée en dessous.

Je suis une femme au service d’une cause, une lutte juste, la lutte des travailleurs, la lutte raciale, la lutte des sexes, des droits, des batailles, des manifestations et ce ne sont pas des actions indignes.

Arguments en faveur d’une surveillance gouvernementale accrue d’Internet :
1. Empêcher la publication de modes d’emploi pour fabriquer une bombe ; réduire le terrorisme, la pornographie, la vente de drogue et le crime.
2. Les trolls, les harceleurs et les pirates. À une blogueuse féministe : « Je vais te violer jusqu’à ce que tu saignes tu habites au ***. La haine raciale : « Salopes de putes noires juste bonnes à servir d’esclaves. » Ça ne représente que 1 % des gens, disent les apologistes. Il faut vous endurcir. (Réponse : Allez vous faire foutre, connards trop lâches pour assumer la responsabilité de la société dans laquelle vous vivez.)
3. Si vous n’avez rien à cacher, qu’est-ce que ça peut vous faire ?

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