La profondeur des tombes

Thierry Di Rollo, Folio SF, 2005 (Le Bélial, 2003), 224 p., 8€ papier


"Un animal est toujours à sa place, dans la nature. L’homme, j’en doute souvent."
Thierry Di Rollo

Présentation de l'éditeur :


Prêt à mesurer la profondeur des tombes ?
Demain. Le pétrole n'est qu'un souvenir. Reste le charbon, et avec lui ses mines titanesques et leurs millions de gueules noires, sa poussière grise et ses cieux asphyxiés. Un monde glacé où l'eau pure est la plus convoitée des denrées, où les animaux clonés en masse vont s'échouer au fond des filons, où le mot « jour » a été remplacé par « nuit claire ». Demain.
Pennbaker est porion, contre-maître à CorneyGround. Et il a contemplé la Mort dans les yeux, des yeux qui ressemblent étrangement à ceux de sa mère... La Mort qui lui a demandé, de cette voix si douce, s'il connaissait la profondeur des tombes... Et Pennbaker sait où chercher. Car au loin brillent les lumières de l'U-Zone, région de non-droit où réside Bartolbi, l'éleveur de hyènes. Débute ainsi la quête en compagnie de CloseLip, la fille chérie, son amour, sagement rangée dans sa valise...
La profondeur des tombes, celle qui nous traque, qu'on passe sa vie à éviter, mais qui, inexorable, nous rattrape...

Mon ressenti :


Suite au Bifrost n.85 consacré à Thierry Di Rollo, j'avais envie de me confronter aux écrits de l'auteur. Voilà la première pierre.
Un demain assez sombre dans cette SF qui m'a fait penser à un autre écrivain français en la personne de Roland C. Wagner et de son roman Les Derniers jours de mai, notamment par son découpage et sa seconde partie erratique. Et ce n'était pas la partie qui m'avait le plus emporté.


J'ai choisi de commencer par ce roman à cause du mot porion figurant dans le pitch et qu'
Au nord, c'étaient les corons
La terre c'était le charbon
Le ciel c'était l'horizon
Les hommes des mineurs de fond
(Ravi si cet air vous trotte dans la tête pendant quelques heures)

Pour en revenir à nos hyènes, le texte se découpe en deux parties : l'une raconte la vie de lâche de Pennbaker, porion dans ce monde où le pétrole a préféré se tirer plutôt que de supporter l'humanité. Et cette dernière s'est donc mise en tête de retrouver le filon du charbon, de manière outrancière comme à son habitude avec comme résultat la transformation du jour en "nuit claire". Par petite touche, l'auteur nous dévoile ce monde irréel et l'histoire de ce Pennbaker. L'écriture est magnifique, empreinte de poésie. Je me suis plongé pleinement dans cet univers dystopique en compagnie de ce porion solitaire et de sa fille CloseLip. Une partie que j'ai apprécié pleinement.

Puis vient l'errance-violence en U-Zone. Et là, j'ai eu beaucoup de mal à lâcher prise. Comme dit plus haut, j'avais l'impression d'une ballade en psychosphère wagnerienne, la réalité se disloque et je n'ai pas réellement compris où voulait en venir Thierry Di Rollo. En outre, la quête de l'antihéros m'a paru vaine et creuse, mais c'est juste une question de perception.

Un bilan mitigé donc, mais la découverte d'une belle plume, de tristes animaux, de belles idées pour un final désespérant et logique. Et ce titre : La profondeur des tombes, magnifique.
Les couvertures des deux éditions sont fortement dissemblables mais reflètent toutes deux le roman, dont sa certaine noirceur. (ma préférence va tout de même à celle du Bélial, signé EIKASIA)
Et l'envie de continuer à explorer une autre face de l'auteur, sûrement par Drift.

Quelques citations : 


Il a peut-être déjà oublié le gros tas mort répandu à nos pieds. Moi, je regarde l’animal une dernière fois. L’hippo était le seul oiseau de nous trois à avoir osé prendre son envol.
Nous, nous n’essayons même pas.

Alors, j’ai hurlé, hurlé à en devenir fou.
Pap…J’aurais brûlé ma vie mille fois pour échapper à ce cauchemar.

Son visage s’illumine. Je le hais. Je voudrais assister à sa lente agonie dans une antichambre nue de l’Enfer. Je me pencherais au-dessus de lui pour maculer sa face d’ordure d’une boule de salive pleine de cire glaireuse, puis je l’exhorterais à crever lentement, indéfiniment, pour découvrir sur ses traits de futur cadavre l’expérience qu’il ferait de sa propre mort, et sa frayeur au seuil du grand saut. Le temps est de mon côté

Je décide de poursuivre ma fuite en avant. Il est de toute façon trop tard pour faire demi-tour.Pennbaker était lâche, mais lucide. Cela ne l’empêchera pas de crever comme le chien qu’il est. Vous suintez de la même lâcheté, à ceci près que vous ne vous respectez pas. Pas plus que moi. C’est pour cette raison que nous pouvons nous entendre. Alors, imbécile ou opportuniste ?
 

2 commentaires:

  1. Di Rollo, c'est effectivement assez sombre et parfois tortueux. Je ne suis guère surprise de ton avis mitigé, et quelques textes m'ont laissée aussi cette impression.
    J'ai bien aimé Bankgreen et Le paradoxe de Grin, beaucoup plus lumineux.

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    1. J'hésite encore entre Drift et Bankgreen. Je me laisse un peu de temps.
      La nouvelle Le paradoxe de Grinn ne me dit rien. Elle est parue dans le bifrost 61 mais ce numéro ne me dit plus rien, soit j'ai zappé de le lire, soit il y a un trou dans mon abonnement.

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