Yéti & Compagnie

Film de Karey Kirkpatrick, Jason A. Reisig, 2018, 1h40mn

Bluffant.
Une utopie dystopique intelligente qui se cache derrière des yétis mignons.

Synopsis :

Vivant dans un petit village reculé, un jeune et intrépide yéti découvre une créature étrange qui, pensait-il jusque-là, n'existait que dans les contes : un humain ! Si c'est pour lui l'occasion de connaître la célébrité – et de conquérir la fille de ses rêves –, cette nouvelle sème le trouble dans la communauté yéti. Car qui sait les surprises que leur réserve encore le vaste monde ?

Mon ressenti :

Ne vous fiez ni au résumé, ni à la bande annonce, Yéti & Compagnie est un film résolument SFFF, qui surpasse nombres de blockbusters SF par ses thématiques riches : utopie, dystopie, progrès, religion, obscurantisme, altérité, communication inter-espèces.

Soit, une communauté de yétis vivant en autarcie au sommet d'une montagne, juste au dessus d'une mer de nuage. Chaque jour son labeur insignifiant, dont l'un consiste à faire sonner le gong pour faire apparaitre le soleil. Lors de son initiation à son futur sacerdoce, une péripétie fait rencontrer un jeune yéti à un Petit Pied. Fier de sa rencontre, il clame sa joie à son village, mais... Les règles de vie sont gravés dans la pierre, littéralement, protégé par le Gardien des pierres. Et l'une d'elle clame : les

Petit Pieds n'existent pas. Refusant de nier la vérité pour se conformer aux règles d'airain, le jeune Yéti est banni.

Je pensais aller voir un sympathique film pour enfants, ce qu'il est par certains côtés, et au final, j'ai été bluffé par l'intelligence de cette animation. Difficile de vous raconter le pourquoi sous peine de vous dévoiler des éléments importants, mais vers la fin, je me demandais comment le réalisateur allait conclure son dilemme Vérité vs Obscurantisme. J'ai craint le pire, le meilleur est arrivé. Un mélange de fantasy et de SF, dont le traitement des thématiques va révéler une réelle profondeur. La communauté, présentée avec une certaine légèreté (et en chanson) et quelques détails insignifiants prendront tous leurs sens une fois la révélation effectuée. Bref, un worldbulding (le mot n'est pas trop fort) cohérent. J'ai bien aimé comment est restitué le dialogue entre humains et yétis, source de malentendus inévitables. Les individus doutant de la Loi sont mis aux bans de la société, des marginaux réprouvés dont même l'indécision nous est montrée. Et même Platon s'invite avec sa célèbre caverne.

jason scheier

Par certains côtés, le film peut agacer : des monstres tous mignons dont on sent l'approche marketing derrière, des chansons qui font mal aux oreilles, des gags gentillets. Cependant, l'une des chansons, celle de la révélation est un rap engagé qui prend toute son ampleur et rappelle les origines de ce genre musical.
Le film permet au plus jeune d'apprécier le spectacle, au moins jeune de se poser des questions sur la société et son fonctionnement.

Si vous aimez la SFFF, allez voir ce film, vous serez subjugué par tant d'habileté.
Un worldbulding cohérent, une profondeur dans les thématiques, c'est un coup de coeur pour moi.

jason scheier