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L'impasse-temps

octobre 02, 2023

 

Dominique Douay, Denoël / Les moutons électriques, 1980/2014, 192 p., 6€ epub sans DRM

On a tous rêvé un jour de pouvoir arrêter le temps. Mais pour en faire quoi ?

Pitch de l'éditeur :

C’est peut-être le fantasme ultime, c’est en tout cas le plus puissant des pouvoirs : parce qu’un jour il a trouvé ce qui ressemblait à un briquet, Serge Grivat un homme timoré, vaincu d’avance, tout le contraire d’un battant, voit l’impossible arriver : désormais, il peut quitter le cours du temps.
Virtuellement invisible, il peut donner libre cours à tous ses penchants, tous ses désirs : dîner gratuitement à la Tour d’Argent, soulever les jupes des belles passantes immobilisées, vider le contenu du portefeuille des messieurs...
Mais quel est le revers de ce pouvoir, quelle malédiction se trouve à l’œuvre ?


Mon ressenti :

Serge Grivat, un type lambda, dessinateur habitant en province, se rend de temps en temps à Paris pour rencontrer les éditeurs. Pas trop reconnu dans sa profession, il a son petit train train qui lui suffit, en apparence, dont sa maîtresse dans la capitale. Pas de vagues, il suit son chemin sans faire d'histoires, ni d'éclats. Un jour. Il prend possession d'un objet.

Un grand pouvoir dans des mains d'une personne aigrie, non valorisée par la société, par le monde, peut-elle faire d'elle une meilleure personne ? Pas sûre...
Une démonstration brillante, toute en légèreté par Dominique Douay. Qui ne nous épargnera aucun des tourments, des provocations, des crimes de son personnage. Un livre malaisant aussi qui me place dans une situation où je me demande comment moi j'agirai avec la possibilité d'arrêter le temps. Sans la société pour me condamner, sans le regard de l'autre, continuerai je à me comporter de manière civilisé ? Pas sûr du tout de la réponse, car je pense que je prendrai aussi ma revanche sur les injustices que je pense subir...

Publié a l'origine en 1980 dans la collection Présence du futur, réédité en 2014 chez les moutons électriques et révisé pour l'occasion, l'impasse temps reste un livre intemporel, quoi de plus logique. Petit plus, j'aime beaucoup le titre. Dans une veine fantastique, ne cherche pas ici d'explications scientifiques sur l'arrêt du temps, le récit poursuit sa progression jusqu'au point de non retour, ou aucun retour en arrière ne sera possible. 

J'ai lu ce roman après avoir lu l'avis d'Emmanuel Quentin qui y a trouvé aussi d'autres axes de réflexion. Rares sont les livres courts qui permettent une pluralité de pensées...
Résultat, j'ai lu un bon livre, et de ce fait,  j'ai demandé d'autres recommandations à Emmanuel

TmbM ne regrette pas non plus d'avoir perdu son temps en lisant ce roman.

Rendez-vous demain

septembre 23, 2022


Christopher Priest, Denoël, 2022, 368 p., 16€ epub avec DRM

 
Le seul prestige de ce roman : me l'avoir fait lire jusqu'au bout

 

Présentation de l'éditeur : 

À la fin du XIXe siècle, le professeur Adler Beck étudie les glaciers et les changements climatiques liés à l’éruption des volcans, aux courants marins et aux cycles solaires. Après des années de recherche, il arrive à la conclusion que la planète subira un refroidissement majeur dans le courant du XXIe siècle.
Pourtant, en 2050, le climat ne cesse de se réchauffer et la montée des eaux semble inéluctable. C’est en tout cas ce que constate au quotidien Chad Ramsey, qui vient d’être évincé de son poste de profileur pour la police. Juste avant son licenciement, on lui a implanté dans le crâne un moyen de communication révolutionnaire. Il va s’en servir pour aider son jumeau, Gregory, qui cherche à en savoir plus sur un grand-oncle qui aurait fait de la prison il y a bien longtemps.
Cet ancêtre serait-il Adolf Beck, le frère jumeau d’Adler, qui aurait connu un certain succès sur les scènes d’opéra d’Amérique du Sud ? À moins qu’il ne s’agisse d’un dénommé John Smith, condamné à cinq ans de travaux forcés pour escroquerie en 1877 ? La vérité pourrait bien remettre en question les certitudes de Chad.

 

Mon ressenti : 

Un nouveau Priest débarque, je me rue de suite dessus (je l'ai lu en avril). Enfin, je regarde le prix : 16€ en epub !!! 22.50€ en papier ! Ouch, ça pique. Heureusement que les médiathèques existent et bonheur, ils ont le Priest en numérique, sinon, je ne l'aurai pas acheté. Reste la question de savoir si ce roman vaut ce prix...

Après avoir lu ce roman, je suis certain d'une chose : Christopher Priest écoute assidûment La méthode scientifique. Une bonne partie de ce que j'ai écouté se trouve dans ce livre, surtout les émissions autour de l'écologie, du changement climatique et celles de SF. Il a mélangé le tout avec ses thèmes favoris, la réalité distendue, les jumeaux. C'est ce qui m'avait fait tiquer à la lecture du résumé, l'impression d'être un concentré de Priest. Mais n'y a-t-il pas trop de Priest dans un seul texte ?

Du Priest à la sauce Méthode scientifique, cela ne pouvait que me plaire. Las, n'est pas Nicolas Martin qui veut. Ici c'est intéressant, mais qu'e st ce que c'est chiant. Il aurait dû prendre aussi la légèreté de l'équipe pour faire son livre. Alors c'est du Priest, la réalité n'est pas forcément la réalité, ca se lit rapidement, mais bon. L'auteur semble se justifier des critiques comme la mienne à la fin de son roman :

Il commença à lire Alerte !, le livre d’Adler. Il avait pour sous-titre : Un scientifique révèle la terreur à venir. Au début, il trouva son style difficile à suivre. Il était pesant, périphrastique, presque pompeux. Les paragraphes étaient longs, les phrases aussi. Le ton était un peu professoral, les rares tentatives d’humour étaient maladroites, il insistait trop sur les détails.
Le premier chapitre, très long, était une histoire de la science des glaciers depuis son origine jusqu’à l’époque où Adler écrivait, soit probablement les toutes premières années du XXe siècle : le livre avait été publié en 1905, Adler avait dû l’écrire un ou deux ans plus tôt. Les détails et les anecdotes étaient visiblement autobiographiques, mais l’usage maladroit de la troisième personne rendait la lecture peu digeste.

Alors oui, si on veut, mais ce roman est chiant à lire. Pas inintéressant, mais juste chiant. Le reproche principal fait aux jeunes auteurs est show don't tell. Voilà ce qu'a fait Priest. Le seul prestige de ce roman : me l'avoir fait lire jusqu'au bout en espérant que. Mais même pas !



Une intrigue captivante selon Le dragon galactique, un puzzle passionnant pour Le nocher des livres, une grande réussite très Priestienne selon Le Maki. Lorhkan est plus réservé : le résultat n’est pas aussi parfait qu’on aurait pu l’espérer et La navigatrice de l'imaginaire rejoint mon avis : Rendez-vous demain n’est pas un roman qui m’a transcendée ni vraiment emportée

Expiration

septembre 27, 2021

Ted Chiang, 2020, Denoël, 464 p., 16€ epub avec DRM


Barak Obama a-t-il bon goût ?


Présentation de l'éditeur :

Les neuf histoires qui constituent ce livre brillent à la fois par leur originalité et leur universalité. Des questions ancestrales – l’homme dispose-t-il d’un libre arbitre ? si non, que peut-il faire de sa vie ? – sont abordées sous un angle radicalement nouveau. Ted Chiang pousse à l’extrême la logique, la morale et jusqu’aux lois de la physique pour créer des mondes inédits dans lesquels les machines en disent long sur notre humanité.

Edition limitée, USA

Mon ressenti :

Il y a quelques années, je lisais le premier recueil de Ted Chiang, La tour de Babylone, auréolé de critiques enthousiastes. Pour ma part, j'avais trouvé cela moyen et très froid, malgré quelques bons textes comme celui qui a donné le film The Arrival. Je n'étais donc guère chaud pour lire ce nouvel opus, mais les premiers retours m'avaient donné l'envie d'y jeter un oeil. Et au final, j'ai bien fait de changer d'avis, les différentes nouvelles sont plutôt pas mal, voire très bien, Ted Chiang ayant abandonné en grande partie sa froideur pour un peu plus d'humanité.

J'ai lu Expiration il y a un an environ,  certain d'avoir publié mon avis. Lors d'un tri de mon bloc-notes, un doute survint : L'ait je vraiment fais ? Après moult recherches, il s'avère que non. Pourtant, je me souviens l'avoir fait, donc deux solutions : le phénomène du déjà vu, ou les réalités parallèles existent... Peut-être avez vous donc déjà lu cet avis, ce qui signifie que nous nous connaissons dans une autre réalité. Quoiqu'il en soit, dans ta grande chance, j'avais rédigé mon avis après chaque texte.

Edition japonaise


Le Marchand et la porte de l'alchimiste
Un conte oriental autour du voyage dans le temps. J'ai été de suite transporté dans ce récit qui interroge la notion de libre arbitre. Un très bon démarrage.

Edition chinoise

Expiration
Rares sont les textes qui ne comportent aucun être humain, en voici un à ajouter à cette courte liste. (liste que vous pouvez trouver sur le FB Fan de SF) Dans une ambiance steampunk, une autodissection d'un robot va interroger une nouvelle fois la notion de libre arbitre.

Edition portugaise



Ce qu'on attend de nous
Un nouvel objet a fait son apparition, le déducteur, un simple gadget, un casse-tête : quoique que tu fasses, le boîtier clignotera une seconde avant que tu n'appuies dessus. De quoi tenter par tous les moyens de trouver comment faire mentir la machine. Mais si tu n'y arrives pas, est-ce à dire que tout est déjà joué par avance ? De quoi en perdre son esprit...
Texte court et rigolo. Mais flippant.

Edition hongroise


Le cycle de vie des objets logiciels
Fatigant, ronflant, chiant. Littéralement. J'ai mis 4 jours à lire ce texte de 130 pages qui a eu l'effet d'un somnifère surpuissant sur mon organisme. Je n'ai jamais autant dormi de toute ma vie en si peu de jours. Un texte qui devrait être remboursé par l'assurance maladie. Une approche non médicamenteuse pour traiter l'insomnie. Je n'ose même pas vous en faire un résumé tellement j'ai peur de me rendormir...

Edition espagnole


La nurse automatique brevetée de Dacey
Il s'agit ici d'un article universitaire autour de l'éducation des enfants. Quelle méthode pédagogique pourrait être la meilleure ? Un robot ? Mais qu'en est-il de l'attachement dans ce cas ?
Rare de voir cette thématique abordée en SF, et ce texte pose beaucoup de questions et d'interrogation qui m'ont bien plu.

Edition russe


La vérité du fait, la vérité de l'émotion
Voici une histoire contée par un journaliste sur une nouvelle technologie naissante, une sorte de moteur de recherche indexant notre vie filmée. Non sans rappeler un épisode de la série Black Mirror, il le dépasse largement par son analyse de cette technologie. Voilà un texte magnifique, qui lie histoire orale et histoire écrite, souvenirs réels et souvenirs fabriqués. Cela faisait longtemps qu'un texte ne m'avait pas autant transporté. Tout simplement excellent.

Edition catalane


Le grand silence
Un texte qui porte bien son nom, car je n'ai pris aucune note dessus et je suis bien en peine de vous en toucher un mot. Alors soit il était génial et m'a coupé le sifflet, soit c'est une grosse merde et j'ai été trop atterré pour en dire un mot. A vous de choisir.

Edition turque


Omphalos
Un monde où science et religion sont en osmose pour décrire la création. Bienvenu chez les créationnistes. Une démonstration par l'absurde où l'auteur crée un univers du point de vue des adeptes de cette théorie. On perd un peu ses repères face à ce changement de paradigme, difficile de mettre en question ses certitudes sur le commencement. Un texte fort intéressant dans son propos, moins dans son récit, ayant eu l'impression de voir un texte à message. Démonstration brillante, mais froide.

Edition polonaise


L'angoisse est le vertige de la liberté

Et si ? Nous nous sommes tous posé cette question à propos d'un événement qui nous est arrivé. Dans ce texte, un ersatz d'ordinateur crée des réalités parallèles quantiques dès son activation. En achèteriez-vous un pour connaître une version alternative de vous ? Ted Chiang explore les conséquences individuelles et sociales d'une telle découverte. Mis à part la morale finale bienveillante (on peut tous devenir quelque qu'un de mieux si on s'en donne les moyens), un très bon texte.

Edition israélienne


L'ensemble se clôt par quelques mots de l'auteur sur l'origine des textes et ce qu'il a voulu y exprimer. Un petit plus fort appréciable. Seule ombre au tableau, le prix et les DRM.


Edition anglaise



A écouter, l'interview de l'auteur dans La méthode scientifique du 18 décembre 2020

Ted Chiang, l'inspiration

Alors que les vacances de Noël approchent à grand pas, l’équipe de La Méthode, comme chaque année, a revêtu son costume rouge et blanc pour vous déposer, avant l’heure, un cadeau sous le sapin. Cette année, nous ne sommes pas peu fiers de recevoir le lauréat de quatre prix Hugo, quatre prix Nebula et quatre prix Locus, le tout pour seulement 2 recueils parus. Sans doute l’un des nouvellistes de science-fiction le plus passionnant de notre époque, l’un de ses textes a déjà été adapté au cinéma par Denis Villeneuve, dans le film “Premier Contact”. Son dernier recueil, Expiration, confirme son immense talent qui emprunte autant à Greg Egan qu’à Borges. Ted Chiang est notre invité spécial.




Vers les étoiles

décembre 14, 2020

Mary Robinette Kowal, Denoël Lunes d'encre, 2020, 560 p., 17€ epub avec DRM

 

Prix Hugo, Prix Locus, Prix Nebula, Prix Sidewise,
De quoi te mettre des étoiles pleins les yeux,
d'ici quelques tomes...


Présentation de l'éditeur :

1952. Une météorite s’écrase au large de Washington, dévastant une grande partie de la côte Est des États-Unis et tuant la plupart des habitants dans un rayon de plusieurs centaines de kilomètres. Par chance, Elma York et son mari, Nathaniel, en congé dans les Poconos, échappent au cataclysme et parviennent à rejoindre une base militaire.
Elma, génie mathématique et pilote pendant la Seconde Guerre mondiale, et Nathaniel, ingénieur spatial, tentent de convaincre les militaires que la météorite n’a pu être dirigée par les Russes. Mais, ce faisant, ils découvrent que la catastrophe va dérégler le climat de manière irréversible et entraîner, à terme, l’extinction de l’humanité.
Seule issue : l’espace. Une coalition internationale lance un programme spatial de grande envergure… inaccessible aux femmes. Elma compte pourtant bien y prendre part et devenir la première Lady Astronaute.


Mon ressenti :

Cela commence sur les chapeaux de roues, alors qu'un couple s'ébat dans une résidence secondaire, une météorite s'écrase non loin de là, ravageant une partie des États Unis. On suit notre couple de scientifiques qui a la catastrophe aux fesses.
Et là, c'est le drame. A vouloir précipiter les événements, il arrive la mésaventure des coureurs de fond partis comme une fusée, le souffle devient court après quelques centaines de mètres, on fait du sur place.

Mais que c'est long ! Je venais de terminer le Bifrost consacré à Shirley Jackson, et j'ai eu l'impression de lire le même genre, de la domestic fiction. Même si son mari est sympathique, il reste un homme des années 50, très peu pour lui le ménage, la cuisine et la paperasse, c'est le rôle de Madame. Et Madame est épuisée, alors elle oublie de payer la facture d'électricité. Mais son mari est compréhensif, il ne lui jettera pas l'opprobre. Bref, une femme d'intérieure épuisée.



Par contre, elle trouve un peu de reconnaissance dans son boulot de calculatrice, même si il faut parfois se payer quelques mains aux fesses. Mais là aussi, son mari veille au grain et comme il est un de pontes de cette pseudo NASA, gare aux mains baladeuses. Le problème principal d'Elma, c'est le public et le stress, elle aime pas cela Elma, un peu du style agoraphobe (ou autisme de haut niveau ?). Alors elle vomit. Beaucoup, souvent. Pas glop, mais son mari est compréhensif, ou plutôt aveugle sur ce coup là, car malgré des années de vie commune, il ne connaissait pas son point faible.



Donc entre les factures et les vomis, cela n'avance pas, les étoiles sont toujours aussi loin dans le ciel, la catastrophe météoritique passe à l'arrière plan. Le fond est plutôt pas mal dans cette uchronie, l'ambiance, le style, on y parle racisme, égalité des sexes et on se doute que tout cela va changer avec le temps. Mais les étoiles restent toujours aussi haut dans le ciel, et moi je n'arrête pas de me dire : envole toi, Elma, envole moi !





En fait, c'est une uchronie très ancrée dans notre réalité, je pense connaitre comment tout cela va se dérouler, d'autant que j'avais déjà regardé la série For all mankind qui parlait à peu près du même sujet, avec aussi parfois les mêmes écueils, trop ancré sur les personnages, pas assez dans l'espace. Arrivé à la moitié, et au vue des 2 tomes supplémentaires parus en langue original (merci pour l'info Mr Denoël !) et les autres nouvelles dans le même univers, je me dis que le chemin va être décidément très long vers les étoiles et préfère arrêter là mon désintérêt croissant.
Moi, ce que je voulais, c'était être un peu plus près des étoiles...




 

Si comme moi tu n'aimes pas les trucs à rallonge, écoute plutôt la méthode scientifique sur les Mercury 7 qui te donnera en outre plein de références notamment sur le groupe Mercury 13 qui rassemblaient des pilotes femmes, autrement appelé First Lady Astronaut Trainees (FLAT) (doc sur Netflix).
Emission qui te donnera aussi une furieuse envie de t'abonner à Disney + !!!

Mercury Seven : le club des 7

La Méthode scientifique du 01 décembre 2020
https://www.franceculture.fr/emissions/la-methode-scientifique/la-methode-scientifique-emission-du-mardi-01-decembre-2020

Si vous n’avez pas rêvé devant "L'étoffe des héros", le film de Philipp Kaufmann sorti en 1983, adapté du roman de Tom Wolfe, peut-être vous laisserez vous emporter par la série homonyme, diffusée actuellement sur Disney et qui raconte elle aussi ce destin hors du commun de sept hommes, recrutés pour propulser les Etats-Unis en tête de la course à l’espace contre la Russie. Une aventure « bigger than life », dont les américains ont le secret, et qui nous replonge dans les tout débuts de la conquête spatiale, sous le feu des projecteurs, lorsque chaque lancement était une prise de risque inouïe, et où tout reposait sur les épaules de ces hommes qui jouaient leur vie, en direct, devant les caméras.
Mercury Seven : le club des 7. C’est le programme casse-cou qui est le nôtre pour l'heure qui vient. Bienvenue dans La Méthode scientifique.

 

Chiens de guerre

juin 15, 2020

Adrian Tchaikovsky, Denoël Lunes d'encre, 2019, 320 p., 14€ Epub avec DRM


Lorsque ton chien s'oublie sur ton roman de SF militaire, est-ce dû au fait que c'est un vilain chien,
ou sait-il que les militaires, c'est le Mal ?

Présentation de l'éditeur :


Je m’appelle Rex. Je suis un bon chien.
Rex est un bon chien. C’est un biomorphe, un animal génétiquement modifié, armé de fusils-mitrailleurs de très gros calibre et doté d’une voix synthétique créée pour instiller la peur. Avec Dragon, Miel et Abeilles, son escouade d’assaut multiforme, il intervient sur des zones de combat où les humains ne peuvent se risquer.
Rex est un bon chien. Il obéit aux ordres du Maître, qui lui désigne les ennemis. Et des ennemis, il y en a beaucoup. Mais qui sont-ils réellement? Se pourrait-il que le Maître outrepasse ses droits? Et si le Maître n’était plus là?
Rex est un bon chien. Mais c’est surtout une arme de guerre hautement mortelle. Que se passerait-il s’il venait à se libérer de sa laisse ?


Mon ressenti :

Vilain chien, bon chien ?
Est ce son instinct, son éducation ?
On s'en fout, cela reste de la faute du chien, et pas de son maître.

Rex est un bon chien, joueur comme il se doit. Quand son maître lance la balle, il va la chercher. En fait non, c'est lui la balle. Et son jeu favori, c'est jouer à la guerre, la sale guerre. 
Comme tout bon chien, il est dans une meute. Mais Rex est un chien cyborg entouré d'animaux ayant subi le même sort. Des bêtes effroyables et effrayantes mis entre les mains des puissants pour pacifier des régions soumises à turbulences. Force décuplée, armement dernier cri et intelligence développée, et qui n'ont rien à faire des lois d'Asimov. Mais lorsque la machine s'enraye, et que l'éclat de conscience s'éveille....

Plus longtemps nous attendrons sans aboyer, plus ils s’approcheront de nos cages pour nous insulter et nous provoquer. Ils recommenceront sans arrêt. Et si nous tentons une seule fois de les mordre, ils diront que nous sommes des animaux.


Comment aborder de manière "plaisante" des sujets complexes  ? Voilà un très bon exemple.
Sur la thématique de la singularité, ce roman aborde les sujets de l'éveil de la conscience, du libre arbitre et in fine, de la cohabitation entre espèce. Le tout de manière ludique, en s’amusant à la guéguerre. Au delà de l'aspect militaire, l'auteur n'hésite pas à aller au-delà du terrain pour nous entrainer dans les conséquences de cet éveil.
Que ce soit dans le pourquoi remplacer par des animaux les militaires, la délégation du sale boulot à des officines pas très nettes, cela reste crédible. Juste une extrapolation de notre présent. Et si les animaux étaient plus humains que les Hommes ?

Il est bien plus facile d’accuser un vilain chien que de confesser un crime. Dès le début, c’était un avantage proposé par le projet de développement des biomorphes militaires. On a donné à Rex un aspect effrayant afin de rendre sa culpabilité plus vraisemblable.

Ceux qui aiment le Bing Bang boum auront leur quota, ceux qui préfèrent la réflexion seront conquis et ceux qui aiment les deux seront joie. Le point fort du roman est de nous mettre dans la tête de cette meute enragée, avec différents points de vue.
Même si quelques facilités parsèment ça et là le récit, l'ensemble est de haute tenue.
Enfant soldat, esclavage,  racisme, de nombreuses lectures peuvent en être faite, le tout avec fluidité et en véritable page turner. Une réussite.


Les avis des blogmorphes :

Je m'appelle Aelinel, je suis une bonne chienne

Je m'appelle Apophis, je suis un bon chien

Je m'appelle Artemus Dada, je suis un vilain chien

Je m'appele Elhyandra, je suis une bonne chienne

Je m'appelle FeydRautha, je suis un bon chien 

Je m'appelle Les chroniques du chroniqueur, je suis un bon chien

Je m'appelle Lorhkan, je suis un bon chien

Je m'appelle Ombre Bones, je suis une vilaine chienne

Je m'appelle Shaya, je suis une bonne chienne

Je m'appelle Xapur, je suis un bon chien


Au vue des autres couvertures, l'édition française s'en sort très honorablement.
Bon chien Lunes d'encre.

 
 
 
 
 édition anglaise
  édition lettone  édition tchèque   édition russe


Et enfin, je peux mettre dans un billet la chanson qui a donné le nom de mon blog




Hier, les oiseaux

juin 11, 2019

Kate Wilhelm, Denoël, 1977, Livre de poche, 2018, 318 p., 8€ epub avec DRM


Si tu en as marre de te faire réveiller à l'aube par le bruit infernal des piafs, ce roman est pour toi.

Présentation de l'éditeur :


La planète est exsangue, ravagée par la pollution, la guerre, la maladie. Les Sumner, de riches propriétaires terriens, pressentent que l’effondrement du monde est proche. Ils décident de construire à Bear Creek, dans leur domaine de Virginie, un centre de recherches scientifiques et d’y organiser la vie en autarcie. Après le cataclysme, les hommes et les femmes se révèlent stériles et disparaissent en quasi-totalité. Créer des bébés par clonage semble pallier la reproduction sexuée. Mais, au fil des générations, les clones sont-ils encore des humains  ? Le retour inflexible de la Nature va-t-il obliger une microsociété à bout de ressources à franchir les frontières pour explorer le monde  ?


Mon ressenti :


Un roman post apocalyptique où l'humanité disparait suite à la pollution de l'environnement, il en sort 10 par mois désormais. Hier, les oiseaux a cependant été écrit en 1977, on peut donc parler de roman novateur pour l'époque.

Le principal défaut de ce roman vient de l'optique prise par l'autrice qui a préféré se focalisé sur l'humain (et ses clones) plutôt que sur la plausibilité scientifique. Les causes ayant amené à la pollution et a la disparition quasi complète de l'humanité sont envoyés en deux lignes. Le worldbuilding est donc assez bancal. En outre, les progrès réalisés depuis autour du clonage datent clairement le livre dans son époque, mais les questions éthiques soulevées restent intéressantes.

Une fois ceci accepté, que reste t il ? L'intérêt à mon sens est que ce post apo revisite le genre en nous proposant une post humanité différente à partir du clonage de l'humain. Elle nous propose une confrontation entre humains et clones, ce qui les différencient ou les lient. Une nouvelle civilisation nait, sur les ruines de la précédente. Qu'est ce qui fait civilisation, c'est la vaste question de ce roman. Lorsque l'individu est interchangeable, lorsque chaque individu est assigné à un rôle, à une fonction, lorsque l'on fonde une société sur l'instant, en oubliant le passé et la projection vers l'avenir, que reste t-il de l'humanité ?
Découpé en trois parties qui abordent l'éthique autour de la science, l'écologie, la sexualité, les normes sociales et l'individu face au groupe, la trame se déroulent sur quelques décennies pour explorer l'évolution de cette société nouvelle.
Centré sur la communauté autarcique, au plus près des individus, ce roman permet un questionnement toujours pertinent sur les questions sociétales et écologiques
Le genre de livres qui donnent peu d'inspirations aux graphistes, si ce n'est pour faire des couvertures hideuses.


Lekarr a apprécié la plume de l'autrice et la délicatesse de sa réflexion sur le devenir de l'homme.
Shaya a trouvé le roman
bien agréable à lire


Prix Hugo 1977
Prix Locus 1977

Récapitulatif

Le 33e mariage de Donia Nour

mai 09, 2019

Hazem Ilmi, Denoël, 2018, 368 p., 15€ epub avec DRM



La religion, c’est ce qui empêche le riche d’être assassiné par le pauvre.
Napoléon Bonaparte



Certifié harām

Présentation de l'éditeur :


Égypte, 2048. Le pays est sous l’emprise du Nezam, dictature d’un genre nouveau, mariage infernal entre consommation et religion.
Avide de liberté et incapable de s’adapter à cette étrange tyrannie, une jeune femme, Donia Nour, n’aspire qu’à une chose : quitter le pays. Malheureusement les frontières sont étroitement surveillées et le passage en Europe coûte un kilo d’or. Elle décide donc de tirer profit du système : elle épouse régulièrement des hommes fortunés et fait annuler le mariage aussitôt le douaire empoché. Mais, le soir de son trente-troisième mariage, la situation dégénère, et elle se trouve contrainte de prendre la fuite. Au cours de sa cavale désespérée, elle prend conscience de l’ampleur des machinations mises en place par les riches et les puissants. Très vite, elle comprend qu’au-delà de sa propre vie, c’est la liberté du pays tout entier qui est en jeu.


Mon ressenti :

Chère Donia Nour,

Nous avons constaté que, les 9 et 10 septembre 2048, vous avez omis d’effectuer la prière du matin. Nous vous informons par le présent avis que les infractions répétées au devoir de prière matinale inscrit dans la Constitution égyptienne sont préjudiciables à votre âme et susceptibles d’entraîner des investigations concernant votre réputation.

La Paix soit avec vous,

LE MINISTÈRE DES STRATÉGIES DE RÉDEMPTION


En 2048, le e-jab est en train de détrôner le hijab. Il est fait en tissu connecté et affiche de la pub. A chaque heure portée, à toi les points pour aller au paradis ainsi que quelques piécettes. Un must qui se doit d'être couplé au chapelet magique qui te donne des points supplémentaires si tu fais bien ta prière. Et si tes parents ton choisi un prénom béni, à toi 1000 points supplémentaires.
Bienvenue au Nizam, une dictature théocrate consumériste égyptienne

Il contrôla les chiffres d’un autre écran et constata que le recours au chariatainment avait triplé en Moyenne-Égypte. Demain, les centres commerciaux seraient pleins. Zulkheir sourit.
La conviction première du Nizam était que rien ne tranquillise plus efficacement les êtres humains qu’une consommation ininterrompue. Zulkheir connaissait Karl Marx, et il savait qu’il avait tout faux. L’opium du peuple, ce n’était pas la religion, mais la consommation. Si le système parvenait à lier les deux, alors la drogue obtenue ne perdait nullement son effet avec le temps. Elle provoquait une irrésistible dépendance. À vie.

Les clés de ce monde dystopique nous seront livrés par Donia Nour, employée pas très modèle, à la foi peu religieuse, dont l'univers va basculé le jour de son 33ème mariage. Et aussi par celle d'Ostaz en 1950, prof de droit et de philo qui aime débattre. A la veille de son procès pour blasphème, il se fait enlever par des extraterrestres qui voyagent à travers la galaxie à la vitesse de la lumière et ce qui devait arriver arriva avec la loi de la relativité restreinte, à son retour sur Terre, il s'est passé 100 ans depuis son enlèvement...

Religion, place de la femme, relation riche/pauvre, consommation, un roman parfois violent, contrebalancé par l'humour et le cynisme. Il y a de l'inventivité, de l''originalité, dans ce gouvernement d'un pays arabe autarcique qui utilise la religion et la consommation pour rester au pouvoir et asservir la population.

Donia remit son foulard en prenant bien soin qu’aucun cheveu ne dépasse. Sur l’e-jab, on voyait justement clignoter le logo de Nike assorti du fameux slogan Si Dieu le veut, just do it !

Une critique acerbe, aiguisée et virulente de la religion, à la manière d'un James Morrow. L'auteur condamne fermement les œillères, le fondement d'une manière de vivre sur un texte écrit il y a quelques milliers d'années et le manque d'ouverture à l'autre. La foi n'est qu'une chaine qui vous maintient à votre place, d'autant lorsqu'elle est au main des puissants. Et sa satire est argumentée, moi qui déteste les bigots, les religions et les dieux, j'étais aux anges.Pour autant, l'auteur ne laisse pas son intrigue de côté, et j'étais impatient de savoir comment tout cela allait se terminer.

J'ai souvent lu des romans sur la critique de la religion catholique, mais c'est la première fois que j'en lis sur l'Islam. Une très bonne découverte. Si vous aimez les dystopies, les romans féministes, si vous adorez James Morrow, jeté un oeil sur ce roman
Petite précision, ce roman est sorti dans la collection "& d'ailleurs" et non pas "Lunes d'encre" des éditions Denoël dans laquelle il aurait pu paraitre sans problème.


Quelques citations :



 Donia rougit, tripota son foulard et répondit : « Oui, Baba, c’est ça. C’est un e-jab. »
Avec soin, elle rentra tout tissu inutile à l’intérieur de son col, puis pressa un bouton. Le tissu s’alluma. De petits logos apparurent, disséminés sur toute la surface du voile.
« Les marques changent toutes les heures, précisa-t-elle en voyant son père ouvrir des yeux ronds.
— Et c’était un bon achat ?
— Je reçois 30 points et un virement de 20 piastres pour chaque heure où je le porte en public. »
Donia avait eu les larmes aux yeux en calculant qu’il lui faudrait porter cet e-jab 860 000 heures, soit 98 ans, pour pouvoir s’acheter la voiture qu’elle voyait en rêve.

Le premier jour de son contrat chez RosarPlus, elle avait allaité ce collègue. Ou, plus précisément, elle avait allaité chacun de ses quatre-vingt-quatre collègues de sexe masculin, depuis le patron jusqu’au stagiaire.
[...]Pour sa première journée de travail, une collègue lui avait demandé de se placer derrière une fine cloison où on avait fait un petit trou. On l’avait alors priée de passer un de ses mamelons dans le trou. De l’autre côté de la cloison, chaque salarié homme était venu téter tour à tour. Techniquement parlant, en l’absence de lait, elle ne pouvait avoir réellement « allaité » aucun d’entre eux ; mais les hommes avaient tous bu une gorgée de lait symbolique, sitôt que leurs lèvres avaient quitté son sein.
[...] Il s’agissait là d’une solution particulièrement raffinée au problème que posait la présence conjointe d’employés des deux sexes dans un espace réduit, notamment en soirée. On avait expliqué à Donia que l’allaitement conduirait les hommes à ne plus voir les femmes que comme des nourrices. En ce sens, Donia deviendrait la nourrice de tous les hommes présents dans l’entreprise — des hommes droits, qui ne se laisseraient jamais aller à faire des avances à celle qui les avait nourris.



— Ce-sont-de-faux-dieux ! » éclata Zulkheir.
Le juge placé à sa droite intervint. « Tu n’es pas ici pour poser des questions ridicules. Réponds plutôt : es-tu un athée ?
— Mais justement, voici ma réponse : par rapport à la plupart des cultures de l’histoire mondiale, chacun de vous est un athée, dans la mesure où il ne croit pas à leurs dieux. »
Regardant intensément les spectateurs, Ostaz poursuivit : « Et moi, je suis comme vous. Moi aussi, je rejette ces dieux. Sauf que j’ajoute un dieu sur la liste de ceux auxquels je ne crois pas. Si vous voulez, vous êtes tous des athées, et moi, je suis une athée plus un. »

« Pourquoi cette haine envers Dieu ?
— Haïr, moi ? Haïr Dieu ? Pas du tout…
— Alors dis-moi au moins pourquoi tu détestes l’islam.
— Je ne déteste pas non plus l’islam. Cela dit… pour être tout à fait honnête, le concept n’est pas précisément à mon goût. Toute cette histoire de soumission…
— Tu es contre le fait de se soumettre à la volonté de Dieu ?
— La volonté de Dieu, qu’est-ce que c’est, au juste ? Ça ne t’a jamais paru suspect de voir la volonté de Dieu s’accorder si joliment avec les intérêts des puissants ? Pour la plupart des acteurs de l’histoire, la volonté de Dieu n’est rien d’autre qu’une voix menaçante dans leur tête qui justifie l’oppression des femmes et la destruction de ceux qui pensent autrement. Rien de plus. Je trouve cette idée de soumission extrêmement dangereuse en soi. »

Seule l’intolérance permet aux religions de traverser les siècles. Regarde un peu l’histoire : les religions qui ont conquis le monde sont celles qui ont prétendu être la seule vraie religion. Les religions plus souples, plus spirituelles, comme celle des Aborigènes, ont presque entièrement disparu. Elles ne pouvaient pas rivaliser avec la force de l’intolérance, cette drogue que les religions distribuent à leurs fidèles.
Ostaz se laissa tomber dans le fauteuil.
« Je suis désolé, Donia, fit-il avec une grimace, mais ce livre qui devrait guider les humains en tout lieu et en tout temps n’est pas assez bon, c’est tout. Il y a 1 400 ans, pardon, 1 500, il était sans doute progressiste ; mais pour qu’on le prenne au sérieux aujourd’hui, il faudrait que ses conceptions de la morale soient moins ringardes. »
Bien sûr que je sélectionne ce qui m’intéresse. Plutôt deux fois qu’une ! Je prends les meilleurs passages, et le reste, je le laisse de côté. J’aime ma religion. Elle fait partie de mon identité. Mais une religion doit évoluer, sans quoi elle finit par disparaître. Aussi longtemps que mes frères en religion considéreront le Coran comme la parole intangible de Dieu lui-même, notre religion restera bloquée au Moyen Âge. Exactement comme toutes les autres religions avant qu’elles ne se débarrassent de leur lecture littérale des textes.





Récapitulatif
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