Eternity Express

Jean Michel Truong, Albin Michel, 2003,
304 p., 14€ epub avec DRM


Je pense qu'un certain Fillon devrait aussi s'inspirer de ce roman pour ramener les comptes de la Sécu à l’excédent.
Une bonne Loi de délocalisation du troisième âge qui nous débarrasserai d'une grande partie de ces politicards indignes bien à l'abri dans leurs tours d'airain.


Présentation de l'éditeur : 


Dans un futur proche. Toujours plus assoiffés de nouvelles technologies, les investisseurs mondiaux n'ont pu anticiper le sinistre krach boursier qui vient de mener l'Occident aux portes du chaos. Aujourd'hui incapable d'entretenir cette génération de baby-boomers devenus pauvres et vieillissants, l'Union est contrainte de voter la fameuse " loi de délocalisation du troisième âge ". L'idée est simple un TGV rempli de retraités qui, via l'Europe centrale puis la Sibérie, file jusqu'en Chine, direction Clifford Estates, luxueux ensemble d'habitations et lieu rêvé pour finir ses jours. Mais cette première expédition ne tarde pas à dévoiler son lot de surprises et de personnages troubles, à l'image de Jonathan, ancien médecin détenteur d'un secret aussi puissant qu'une bombe...

Mon ressenti :


Une anticipation proche de notre temps, sans voiture volante ni nourriture en gélules, la pyramide des âges a loupé une marche et les personnes en situation de vieillissement pour utiliser la novlangue libérale sont devenus un fardeau pour les jeunes et donc pour la société. Après la bulle internet qui fait plop, la bulle sénile (la silver économie) a fait flop aussi.

Clifford Estates, Chine
Nous voici donc dans un train en partance pour la Chine en compagnie d'anciens riches tombés dans la "pauvreté" après quelques placements hasardeux. Le but du voyage, le paradis sur terre, un luxe à couper le souffle afin de finir dans la joie et l'allégresse. Certains y vont tout de même en trainant la patte, parce que le choix, ils ne l'ont pas eu. Ce sont leurs chers enfant qu'ils n'ont pas eu qui ont décidé pour eux. Les vieillards, ça plombe sacrément les comptes sociaux. Donc on privatise la vieillesse, un aller sans retour en Chine où le niveau de vie est beaucoup plus bas et les concessionnaires du service public pourront même se faire quelques bénéfices.
L'inconvénient principal est que c'est un peu loin de l'Europe et de ses petits enfants, mais le bonheur mérite bien quelques concessions.

Concessions que ne vous donnera pas Jean Michel Truong qui fait feu de tout bois : solidarité intergénérationnelle, capitalisme, médecine, fin de vie et fonds financiers. Rien n'échappe à son regard acéré et au décorticage en règle. Et en matière de règle, le profit a largement supplanté l'éthique.

"Il faut que certains meurent pour que le plus grand nombre vive"

Que reste t-il lorsque l'on retire les oripeaux sois disant avantageux du capitalisme ?
De l'individualisme, du cynisme et la loi du plus riche.
L'Europe décrite n'est pas très reluisante, mais la Chine promène quelques casseroles elle aussi. Et à vivre dans des sociétés de l'instant en oubliant d'où on vient peut parfois avoir de fâcheuses conséquences.


A trop vouloir démonter la mécanique néolibérale, l'auteur en oublie parfois qu'il écrit un roman et non un essai, mais l'acuité de son regard m'a vite fait oublier ce défaut qui pourra cependant gêner certains lecteurs (trices).

Optimisme, Pessimisme, Réalisme ?
Tout dépendra de votre sensibilité. Pour ma part, au vue des programmes politiques des futurs candidats à la présidence, j'opterai pour du réalisme.
Et vous ne pourrez pas dire que Jean Michel Truong ne vous a pas prévenu.
Glaçant !

14€ l'epub verrouillé, vous savez ce qu'il vous reste à faire...

Jean Michel Truong a étudié la psychologie et la philosophie, a été chercheur et il est aussi cogniticien, expert en intelligence artificielle. Parallèlement, il conseille de grands groupes à s'implanter en Chine.
il a écrit trois romans, dont Le successeur de Pierre qui a remporté le Grand Prix de l'Imaginaire en 2000.


Quelques citations :


Un compromis intelligent… C’était l’argument officiel, maintes fois seriné lors de la campagne qui avait précédé le vote de la Loi de délocalisation du troisième âge. À prestations égales, le coût de la vie était six fois moins élevé en Chine. Y expédier les retraités permettait de leur offrir une fin de vie décente, à moindres frais pour la collectivité.

Benoît avait été informaticien, de la caste des ingénieurs réseau, ces vestales sourcilleuses veillant jour et nuit au bon fonctionnement du Net. Les ans avaient exacerbé chez ce grand dadais au visage ingrat le naturel taciturne, limite asocial, qui était aux gens de sa confrérie ce que le label AOC était aux fromages et aux vins : une garantie de qualité.

En d’autres temps, soucieux, quoi qu’il en dît, de son image à l’étranger, le Parti eût fait preuve d’un semblant de retenue. Mais c’était après l’attentat du World Trade Center. De la Russie aux Amériques en passant par l’Afrique, le Moyen-Orient et la péninsule arabe, tous les Ubu de la Terre s’étaient saisis du prétexte du terrorisme pour légitimer leurs propres ignominies – intrusions dans la vie privée, suppression des libertés fondamentales et autres violations, plus ou moins marquées selon les latitudes, des droits élémentaires de leurs opposants. Les tyranniques géniteurs des princelings – qui depuis la tragédie de Tian’anmen avaient, sous la pression internationale, refréné leurs instincts sanguinaires – reçurent le signal du 11 septembre comme un feu vert libérateur, et c’est avec une ferveur de croisés, mais non sans arrière-pensées, qu’ils s’enrôlèrent sous la bannière de la lutte internationale contre le terrorisme. Arrestations illégales, tortures, massacres, tout redevenait brusquement licite, mieux : tout redevenait moral. « Terrorisme » donc, la dissidence des bouddhistes tibétains et celle des musulmans ouïgours, « terrorisme » les exercices hygiéniques de la secte Falungong, « terrorisme » encore les protestations des paysans accablés d’impôts illégaux, « terrorisme » toujours les occupations d’usines, et « terrorisme » bien sûr les défilés d’étudiants.

10 commentaires:

  1. Livre qui, de mémoire, m'avait paru un peu trop prévisible. Un bon livre mais je lui ai préféré dans un autre domaine Le Successeur de pierre qui est excellent.

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  2. La conclusion est plus ou moins attendue mais si les vieux auraient eu une fin de vie heureuse, le romam aurait été bancal !
    Le sucesseur de Pierre est dans mes prochaines lectures.

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  3. Cela commence un peu mal : DRM + 14€.
    Ensuite ce que tu en dis ne m'inspire pas.
    Bref, ce sera un non.

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    1. Tu me rappelles que j'ai oublié de faire mon laïus sur le prix !

      Tu aurais dit que le livre t'intéressais, je me serais retourné dans ma niche.

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  4. Non, en format numérique j'ai adopté ton point de vue, à plus de 10€, je "tique"!
    Je veux bien le ire pour que tu te contorsionnes! ;-)

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    1. Tique de chien ?
      J'attends ton billet donc.

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    2. Moins de 10€ c'est rare.... J'ai justement regardé les prix des différents éditeurs pour les nouveautés. L'atalante, Le Bélial et Au diable Vauvert sont les seuls à pratiquer ces prix. :-(

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  5. Je me rappelle cette lointaine lecture, prévisible mais sympathique et noire comme il faut.

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    1. Oui, c'est un texte qui marque le lecteur par sa noirceur et son cynisme.

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