Bifrost, Le Bélial, 2017, 192 p., 6€ epub sans DRM
Editorial : Olivier Girard y déplore le manque de talents - publiables - français en SF, d'où un sommaire des nouvelles 100% anglophone. Il évoque aussi quelques changements à venir : des nouvelles plus nombreuses dans les prochaines livraisons. A suivre...
La Dernière plume de Matthew Kressel.
Un écrivain se retire pour écrire son dernier roman que
personne ne lira. Il reprendra l'inspiration auprès d'une jeune muse. Nostalgie
de l'ancien temps qui ne reviendra plus, y est déploré la fin du papier : nous sommes dans la science fiction, si c'est juste pour déplorer les nouvelles technologies, sans autres fondements que la nostalgie... Un
texte dépourvu d'originalité sauvé toutefois par un
habillage SF plaisant. Mais bon, si je lis de la SF, ce n'est pas pour
avoir des textes au thématique de littérature générale. Le directeur du Bélial déplore le manque
de talent français, ce n'est pas cette nouvelle qui m'a démontré que les anglosaxons font mieux. Comme le dit Egan dans l'interview :
Utiliser la science-fiction pour bricoler des métaphores sur des thèmes familiers revient à la dévoyer ; c’est comme prendre un microscope pour s’en servir de presse-papier.
La Vallée de l'étrange de Greg Egan
Difficile de résumé sans spoiler, donc passons directement aux thématiques : Qu'est ce qui fait la conscience, l'identité ? Les souvenirs ? L'expérience ? Au delà de la non acceptation des androïdes et de la non reconnaissance de leur existence par la société, Greg Egan nous interroge sur Et si nos souvenirs étaient incomplets, serions nous la même personne ? Serions nous une personne ? Un bon texte au personnage attachant.
Suit le fameux Cahier critique sur l'actualité du genre SF.
Afin de pouvoir prévoir ses futurs achats. Indispensable pour ne pas
jeter de l'argent par les fenêtres. Le nombre de pages de la revue n'étant pas illimité, quelques critiques en ligne ici
J'y ai repéré Au bal des actifs; Celestopol qui me faisait envie, mais me fait douter d'après quelques points soulevés; L'enfer du troll (qui traine sur ma liseuse de même que son instinct), Le Moineau de Dieu (idem)
La présentation d'Oregon de Pierre Pelot avait tout pour me plaire, mais la conclusion de Laurent Leleu a de quoi refroidir les ardeurs. Idem pour Playground de Lars Kepler
Dans Le coin des revues (et fanzines), rien à sauver d'après Thomas Day
La revue donne ensuite la parole à un illustrateur : Caza et à des librairies fantômes ! De quoi voyager dans le temps pour les parisiens.
Arrive alors le spécial Greg Egan. Pas de photo du monsieur, mais un scan de son cerveau, pas si mal !
L'interview est le moment que j'attends le plus à chaque livraison de la revue. Et cette dernière a bien failli ne pas exister, Greg Egan ayant "envoyés chier dès la seconde question de l’interview qu’on avait entrepris de lui consacrer (non non, on a pas les boules) " l'équipe du Bélial. Plus d infos ici. De fait nous avons le droit à une "vieille" interview de 2011. On y côtoie un auteur militant et droit dans ses bottes concernant l'utilisation de la science dans la SF. Un homme qui fait la part des choses entre SF d'émerveillement et la sienne très méthode scientifique. Il apparait cependant par instant comme détenteur de LA vérité, mais n'est ce pas le lot de tout le monde ?
La fin des certitudes, de Philippe Boulier, est l'article qui m'a le plus emporté, décrivant les différentes thématiques et approches de l'auteur. Ayant peu lu de lui, mais lisant régulièrement des avis sur ces textes, je voyais un Greg Egan hard science pur et dur, mais c est aussi un penseur critique sur notre société bien que le sieur s'en défende.
Un article se penche sur la cas Quarante deux, une confrérie secrète organisant des déjeuners entre initiés, et dont il semblerait aurait usé de son influence pour que Greg Egan soit publié en France ! J'avais souvent entendu parlé des 42, sans savoir réellement ce que cela recouvrait, me voilà informé.
Les deux guides de lecture (romans et nouvelles) sont frustrantes à deux titres : les romans les plus abordables sont les moins réussis. Et le guide étant le fait de plusieurs chroniqueurs, difficile de se faire un jugement précis an fonction des goûts et des couleurs des uns et ses autres. On pourra aussi reprocher quelques redondances entre les guides et l'article de Philippe Boulier.
Bref un dossier très instructif et frustrant : l'oeuvre est inabordable pour le simple mortel que je suis. Et en vieillissant, le bonhomme ne met pas d'eau dans son vin car il conseille désormais "que le lecteur ait un crayon à la main pour noter les passages à éclaircir, ou aille sur son site lire un article de vulgarisation scientifique complémentaire et peut-être même nécessaire…"
Pour ma part lire de la science fiction, c'est s'émerveiller et s’interroger sur la société, Greg m'a clairement fait comprendre d'aller côtoyer d'autres auteurs. Dommage car ce traitement science et réflexions sociétales est plus qu'intéressant.
Je ne suis pas intéressé par les histoires qui invitent le lecteur à rester bouche bée « d’émerveillement » face à la taille de l’univers, aux échelles de temps cosmologiques ou aux étrangetés quantiques, ni par les histoires qui abordent la notion, évidente depuis maintenant longtemps, qu’il n’y a aucun dieu et que nous n’avons aucun but préexistant, comme s’il s’agissait d’une humiliante révélation soulignant notre insignifiance et notre impermanence. La littérature qui se confronte véritablement avec la réalité n’est pas choquée par ce que l’on connaît déjà depuis des siècles. À la place, cette littérature s’émerveille du fait que nous ayons réussi à en apprendre tant au sujet de l’univers, et en savoure les détails.
Une œuvre d’art qui ne dit rien sur les lois de l’électromagnétisme, la gravité, la mécanique quantique, rien sur l’ancrage physique de la conscience, rien sur le processus lors duquel nous avons appris les lois qui gouvernent tout ce qui nous entoure, cette œuvre serait pareille à une œuvre d’art représentant la Terre actuelle mais sans la moindre mention des lois et coutumes humaines, des tensions entre l’individu et la société, des représentations d’une ville, d’un village, d’une forêt ou d’une rivière. Un art qui ne voit pas le véritable environnement dans lequel nous vivons – la réalité physique dans son sens le plus large – serait myope et équipé d’œillères, quelque chose d’aussi absurde que pathétique.
Roland Lehoucq nous livre un scientifiction sur Des roues dans l'espace
Si vous pensez que certains vaisseaux sont circulaires et tournent sur eux même pour faire joli, je ne peux que vous inviter à lire l'article. Le bon professeur Lehoucq va vous expliquer le pourquoi de la chose via les concepts de gravité artificielle, d'impesanteur, d'inertie et de force centrifuge...
Et nous livre un conseil si toutefois vous avez l'occasion d'aller sur ce genre de vaisseau spatial : "Je ne recommande donc pas de jouer au basket ou de faire du saut en hauteur dans une station orbitale" ou bien alors d'avoir un sac à vomi proche !
On finit par les paroles de Normes et l'appel au vote pour le prix des lecteurs Bifrost 2017.
Pour finir, une version epub toujours bancal : un sommaire non mis à jour totalement, des espaces très nombreux qui apparaissent ou disparaissent, des renvoies aux notes non valides, un roman imputé à un autre auteur. Rien de rédhibitoire à la compréhension mais ces problèmes durent depuis pas mal de numéros. Agaçant. Réagissez ! (une version corrigée a été mise en ligne le 06 novembre, après rédaction de mon avis, mais j'ai la flemme de vérifier si tout est rentré dans l'ordre)
On est d'accord c'est un numéro excellent, cet interview de Greg Egan wahou ! Et le dossier de Thomas Day aussi. Le ton des libraires fantômes et l'interview de Quarante-Deux m'ont un peu agacé, enfin surtout ladite interview avec un grand renfort de "c'était mieux avant".
RépondreSupprimerSinon c'était ma première lecture du Bélial' en numérique et je te rejoins sur tes remarques à ce sujet.
Je vais le chroniquer aussi, mais comme je disais chez lutin je crois, j'espère chroniquer d'autres revues aussi.
Je n'ai, pour ma part, pas trouvé le ton trop nostalgique. Cela m'a permis de comprendre un peu mieux les rouages éditoriales et du fandom. Un monde assez particulier et surtout caché. Moins maintenant.
SupprimerPour le bifrost numérique, je ne comprends ou n'ose comprendre le pourquoi. Lorsque Le bélial sort un livre numérique, peu d'erreur et une bonne mise en page...
Je crois que c'était le premier numéro numérique fait par l'équipe, avant le travail était délégué.
J'attends avec impatience ton avis sur les Galaxies SF, cela me fera un deuxième avis sur ce magazine.
Oui, il est vrai qu'il m'a permis aussi de comprendre énormément de choses sur les rouages éditoriaux et le fandom comme tu dis. Mais je sais pas, il y a certains passages qui m'ont fait tiquer. Enfin, ça doit être moi. Difficile de se faire un avis sur une seule interview et quelques phrases. C'est purement une impression à chaud.
SupprimerPour Galaxies, ils dorment en France, donc ça sera pas avant quelques mois :D
Après tu as peut être raison, il faudrait le relire pour se faire un avis. Et comme tu le disais plus haut sur l'article avec les librairies d'antan, de naguère ou de jadis...
SupprimerJ'attendrai donc pour Galaxies, j'ai encore de la lecture pour quelques siècles
J'ai bien aimé aussi cette vision des librairies"avant".
RépondreSupprimerJe te rejoins sur la nouvelle de Kressel, je la trouve sympathique, touchante mais bien légère. Le niveau est largement compensé par celle de Greg Egan.
Pour les livres que tu trouves "abordables", je pense que nous avons coché les mêmes - Zengedi et Isolation - qui sont malheureusement les moins réussis. Je rajoute aussi la cité des permutants qui me fait bien envie... J'ai laissé tomber les nouvelles, et je persisterai dans cette voie.
J'ai pris le coup du calepin et des références à consulter comme un "joke" car je ne m'imagine pas de lire un livre de SF comme un sujet d'étude ou un essai. Cela reste avant tout un plaisir!!! Enfin, si les romans qu'il propose arrivent à ce stade, ce sera sans moi.
L'avantage d'un bifrost papier, c'est que non seulement on peut griboullé dessus, faire des dessins dedans,assister à quelques grimaces mais aussi profiter d'une maquette nickel!
Je ne sais pas si c'est une plaisanterie, mais même sans papier, les avis concordent pour dire qu'Egan n'est pas accessible au tout venant des lecteurs. Après, il en faut pour tous les goûts, donc cela ne me dérange pas plus, à part le fait de me dire que je loupe peut être quelque chose.
SupprimerAvant je faisais comme toi, mais depuis qu'ils offrent la version numérique, je ne fais que surligner. A quand une maquette numérique au niveau de celle papier, that is the question
Isolation parmi les moins réussis ?
RépondreSupprimerC'te blague.
Une tuerie ce livre.
Rassure toi, je pense juste qu'il s'agisse d'une erreur du lutin.
SupprimerDans le Bifrost : "Bref, Isolation s’avère un vrai tour de force littéraire, une nouvelle fois propice à l’émerveillement du lecteur, basé sur des spéculations scientifiques de haute volée : Greg Egan dans toute sa splendeur."
Dans la critique des romans (après vérification), les "moins bons" en accesible : Téranésie et Zendegi
Oui, il s'agit de Téranésie. Isolation je l'ai aussi coché. Une inversion suite à un commentaire de mémoire. :-)
SupprimerAcheté mais pas encore lu ! Ton article me met l'eau à la bouche :D
RépondreSupprimerJ'ai donc réussi à décrire mon ressenti. J'espère qu'il te satisfera autant qu'il m'a plu.
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