Ken Liu, Le Bélial, 2016, 112 p., 4€ epub sans DRM
Mais que d'histoires pour une histoire, alors même que l'Histoire nous dit qu'il ne sait rien passé.
Présentation de l'éditeur :
Futur proche.
Deux scientifiques mettent au point un procédé révolutionnaire permettant de retourner dans le passé. Une seule et unique fois par période visitée, pour une seule et unique personne, et sans aucune possibilité pour l'observateur d'interférer avec l'objet de son observation. Une révolution qui promet la vérité sur les périodes les plus obscures de l'histoire humaine. Plus de mensonges. Plus de secrets d'État.
Créée en 1932 sous mandat impérial japonais, dirigée par le général Shiro Ishii, l'Unité 731 se livra à l'expérimentation humaine à grande échelle dans la province chinoise du Mandchoukouo, entre 1936 et 1945, provoquant la mort de près d'un demi-million de personnes… L'Unité 731, à peine reconnue par le gouvernement japonais en 2002, passée sous silence par les forces d'occupation américaines pendant des années, est la première cible de cette invention révolutionnaire. La vérité à tout prix. Quitte à mettre fin à l'Histoire.
Mon ressenti :
On peut comprendre les Gouvernements qui ne cessent d'oublier le passé face aux controverses suscitées par le passé. Alors ils ont inventé l'Histoire, l'Officielle, celle que l'on peut éduquer, celle qui donne du sens à leur histoire, à leur vision. Celle qui crée du lien, une communauté, une société.
C'est ce que nous raconte Ken Liu suite à la controverse historique provoquée suite à la possibilité de visionner le passé, en particulier un épisode lors de la seconde guerre mondiale : l'expérimentation humaine à grande échelle par les japonais sur des sujets chinois. Un détail de l'histoire pas très reluisant et dont les deux pays n'auront de cesse de censurer, de réviser, de nier pour servir leurs intérêts.
L'auteur décortique le concept d'histoire, de mémoire et de souvenirs et c'est une grande réussite. Il a l'intelligence de rendre son récit universel en nous parlant des conséquences mondiales de cette invention. Et surtout à mon sens dans le fait d'avoir évité le pathos (et le voyeurisme) en utilisant le procédé de retranscription d'un documentaire audiovisuel. Cela permet une pluralité de point de vue, du négationniste au partisan du devoir de mémoire en passant par des attitudes plus pondérées. Cependant, cette forme a aussi son corolaire : un ton froid dénué d'empathie.
Ce qui m'a le moins convaincu, c'est que Ken Liu, en discourant sur l'Histoire, oublie son histoire qui se résume à quelques pages en début et en fin de texte.
Lu ce texte après avoir lu Lumière des jours enfouis sur une thématique proche, celle de pouvoir visionner le passé (mais avec un traitement différent). Mais ici, l'observation est unique et s'évapore dès qu'une personne revit le passé. La SF passe dès lors à la trappe.
Ce qui me restera en mémoire, c'est que les points de détails de l'Histoire ne sont l’apanage des occidentaux. Je n'avais déjà pas une grande foi en la bonté humaine...
Quatrième réimpression en un peu plus d'un an, les avis sont déjà très nombreux et sont recensés sur le fil de discussion de cette novella sur le site de l'éditeur
Quelques citations :
On ne saurait balayer la vérité et on ne devrait pas dire aux familles des victimes ni au peuple chinois que la justice est impossible, que le dégoût du gouvernement américain à l’égard de leur gouvernement actuel implique qu’une grave injustice restera ignorée et dissimulée au monde. Fait-il le moindre doute que cette résolution non contraignante, voire une version beaucoup plus sévère, aurait été adoptée sans difficulté si les victimes appartenaient à un peuple dont le gouvernement aurait la faveur des États-Unis ? Si, pour des motifs « stratégiques », nous sacrifions la vérité au profit d’un gain à court terme, nous aurons simplement réitéré les erreurs de nos ancêtres à l’issue de la Guerre.
Quand le calme règne, rester civilisé et posé ne présente aucun problème, mais votre véritable personnalité n’émerge que dans les ténèbres et sous la pression : s’agit-il alors d’un diamant ou d’un simple morceau de charbon ?
C'est surement l'opus de la collection Une Heure Lumière qui marque le plus les esprits. Cette novella est à lire pour découvrir un pan de l'histoire assez méconnu des occidentaux et pour découvrir Ken Liu.
RépondreSupprimerComme les autres n'étaient pas terribles... (je plaisante)
SupprimerMoins emballé que toi, mais un bon texte. Avec un zeste de SF, cela aurait parfait.
C'est le premier que j'ai lu dans cette collection, quelle claque ça a été ! (surtout quand on est très intéressé par l'Histoire et la façon dont elle s'écrit). Et elle m'a aussi ouvert les yeux sur tout un pan de la Seconde Guerre Mondiale dont j'ignorais presque complètement l'existence vu qu'on l'aborde à peine en classe.
RépondreSupprimer4e réimpression quand même !
Le Bélial a bien rempli son bas de laine. Et fait son travail de découverte !
SupprimerJe ne te sens pas aussi séduit que cela par le texte qui pourtant est dans ta zone de prédilection, il me semble. AN même temps, je ne suis pas étonnée car tu le lis après avoir eu tant d'avis positifs...
RépondreSupprimerUn bon texte en lui-même, mais j'attends autre chose de la SF.
SupprimerEt moi et l'Histoire...
la claque ce bouquin ! même si parfois, j'ai pas tout compris, oups !
RépondreSupprimerQu'est ce que tu as mal compris ?
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