La Quête onirique de Vellitt Boe

Kij Johnson, Le Bélial, 2018, 200 p., 9€ epub sans DRM



A bas le jeunisme : Les vieilles aussi ont le droit à leur quête initiatique !

Présentation de l'éditeur :


Clarie Jurat a disparu. Nul ne sait où, mais il semblerait qu'elle se soit enfuie en compagnie d'un homme… un homme venu du monde de l'éveil. Au sein du Collège de femmes d'Ulthar, c'est la consternation : pareille fugue pourrait remettre en cause l'existence même de l'institution. Pour Vellitt Boe, le temps est venu d'abandonner ses atours confortables de professeure vieillissante au profit de sa défroque oubliée de voyageuse émérite ; retrouver son élève est impératif. Une quête qui la conduira loin, bien plus loin qu'elle ne l'imagine, d'Ulthar à Celephaïs, au-delà même de la mer Cérénarienne, jusqu'au trône d'une ancienne connaissance, un certain Randolph Carter…

Mon ressenti :


Suite à la fugue d'une de ses élèves dont, malheureusement, le père est un riche donateur, une vieille prof prend son ballot et part à la recherche de sa protégée. Le pitch aurait pu faire un magnifique téléfilm américain diffusé l'après midi sur M6 ou TF1, mais Kij a préféré en tirer une nouvelle fantastique se déroulant dans les contrées du rêve. Ouf !

Faire d'une vieille marcheuse une nouvelle qui tient le lecteur en haleine n'est pas donné à tout le monde. Avec le mystère entourant le passé de la voyageuse, les contrées plus fantasmatiques les unes que les autres ou encore ce chat noir qui ne quitte pas les pas de Vellitt, on prend le pas de cette prof et on se demande vers où veut nous emmener l'autrice.


Les clefs de ce monde fantasmagorique nous sont livrés peu à peu, comme le passé de cette bourlingueuse. Ceci dit, l'histoire est assez linéaire : malgré la profusion d'ennemis lancés à ses trousses, dont les Dieux eux mêmes, Vellitt sans sort à peu près sans égratignures. Et la fin n'est pas à la hauteur du reste, me laissant un tout ça pour ça !

Avec une chatte en couverture, je pensais que la présence féline allait être bien plus importante. En lisant les avis des uns et des autres, pour comprendre cette place du chat, la connaissance de Lovecraft reste indispensable. En effet, ce texte est une réécriture de La Quête onirique de Kadath l'inconnue. Ce dernier était raciste et ne laissait que peu de place aux femmes, Kij en fait un texte féministe, en mettant une héroïne forte accompagnée de quelques égratignures à la société patriarcale. Mais je l'ai trouvé plus intéressante dans sa critique de la religion. Pour moi, il est nécessaire de connaitre le texte original pour apprécier pleinement cette quête.
J'ai pensé à Christopher Priest et son archipel du rêve en lisant ce livre, surtout dans sa partie sur l'eau, car le temps s'écoule différemment dans les contrées du rêve.


Cette édition est illustrée par Nicolas Fructus et se termine par un entretien de l'autrice. Des petits plus toujours bien sympathiques.

Cette novella a reçu le World Fantasy Award 2017 de la Meilleure novella ainsi que le Prix Wojtek Siudmak du graphisme : Nicolas Fructus pour ses illustrations.
Tous les avis des uns, des unes et des autres sur le fil de Bélial

Récapitulatif


Pour aller plus loin :

Si tu veux tout connaître des contrées du rêve, tu peux toujours écouter
H.P. Lovecraft  - Le Monstre de Providence, La compagnie des auteurs du 06 juin 2016
Chuchotements dans la nuit de Howard Phillips Lovecraft, Fictions du 08 octobre 2016
Le rêve, le cauchemar des neurosciences, La méthode scientifique du 13 mars 2017
L'espace-temps selon Lovecraft, La méthode scientifique du 03 novembre 2017
Des ombres sur Innsmouth, Fictions du 24 février 2018
La couleur tombée du ciel, Fictions du 03 mars 2018
S.T. Joshi : "Je suis Lovecraft", La méthode scientifique du 07 juin 2019

Quelques citations :


Elle n’avait jamais vu de rêveuses. Pas la moindre. Un jour, elle avait demandé pourquoi à Randolph Carter.
« Les femmes ne rêvent pas en grand », avait-il répondu, dédaigneux. « Elles rêvent de bébés, de tâches ménagères… De tous petits songes. »
Les hommes des contrées du rêve disaient sans cesse de telles idioties ; ceux du monde de l’éveil aussi, visiblement.

Pourtant plus gros, les ghasts et les gugs l’épouvantaient beaucoup moins. Ces êtres monstrueux avaient l’avantage de ne présenter aucun caractère humain, et on ne voyait nul trace d’intelligence dans leurs yeux effrayants. Quand on observait les goules, du point de vue de leur morphologie comme de leur comportement, rien n’était plus simple que d’envisager la possibilité de sa propre dégénérescence ; comme si la seule chose qui les séparait des humains, en définitive, se résumait aux articulations grotesques de leurs jambes. Parfois, Vellitt palpait sa mâchoire pour s’assurer que celle-ci ne s’était pas allongée, qu’elle n’avait toujours rien de canin.

19 commentaires:

  1. Bjr amigo, dis-moi, les illustrations résiste bien au format epub ?
    J'ai le souvenir d'éditions, où l'association des deux, n'était pas très agréable à lire.

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    1. Cela n'empêche nullement la lecture, mais les images sont petites et présentées à la "vas-y comme j'te pousse". Mais c'est malheureusement le cas de nombre (tous ?) epub illustrés. Les format epub n'est clairement pas adapté pour ce genre d'usages.
      Si les illustrations sont importantes pour toi, je te conseille fortement d'acquérir la version papier. En outre, il parait que c'est un bel objet avec couverture à rabats.

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  2. Ma religion m'interdit les livres avec un chat sur la couverture.

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    1. Même les couvertures avec un chatentacule ?

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    2. Je rigole parce que j'ai loupé le "ta" en me disant oooooh mais en relisant je comprends que c'est moi qui ai le cerveau mal tourné oups ^^

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  3. Un roman réussi avec beaucoup de références, je l'avais bienapprécié, et puis le personnage principal est une femme, pendant féminin du héros de Lovecraft (qui apparaît).

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    1. Un peu moins emballé pour ma part.
      Lovecraft y apparait ?

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  4. Déjà que je fuis tout ce qui a trait, même de loin, à Lovecraft - d'ailleurs je ne sais pas ce que je fais là -, si en plus tu rajoutes du Priest, ce livre devient presque ma némésis.

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  5. Bien aimé cette lecture, c'est sympa de suivre une femme de cet âge-là et les illus contribuent grandement au charme de cette lecture. Je l'ai lu sans connaître la nouvelle de Lovecraft, ça passe crème même si c'est intéressant de dresser des parallèles après ^^

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    1. Pour ma part, en lisant les avis des autres, je pense que la lecture du texte de Lovecraft m'aurait mieux fait apprécier ce texte.

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  6. C'est ma méconnaissance du texte d'origne qui me freine vraiment, car il semble en effet que le jeu de miroir fait partie inégrante de sa saveur. Or n'ayant pas le miroir...

    J'aime beaucoup ton billet.

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    1. Je pense que lire le texte d'origine est une condition sine qua none (quoique en dise Vert !) pour sucer toute la moelle de ce texte.

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  7. Ah, moi je veux lire ce texte à cause du chat justement, hihi. Toujours pas fait car je veux d'abord relire Kadath, dont je garde un souvenir très confus...

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    1. Le chat n'est clairement pas la vedette, mais lire le Kadath devrait être profitable.

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  8. Chouette texte, mais c'est vrai que j'ai regretté de ne pas avoir relu l'original avant, son souvenir est très flou :/

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    1. C'est le problème principal des ré-écritures, le texte original doit être lu pour apprécier pleinement.

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  9. Devoir me farcir du Lovecraft ne m'enchante pas des masse mais il va peut-être falloir car ce livre est bien tentant, bref pas une priorité mais j'ai mis les 2 dans la Wish

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    1. Oui, je te conseille fortement de lire le Lovecraft avant. ET comme cela, tu m'expliqueras pour le chat.

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