La Machine à indifférence et autres nouvelles
Anthologie de Tony Sanchez et Denis Taillandier, Atelier Akatombo, 2021, 276 p., 13€ epub sans DRM
Project Itoh, Yūsuke Miyauchi, Toh EnJoe, Taiyō Fujii et Hirotaka Tobi
Quoi ?
Une anthologie de SF japonaise sans aucun méchas ! Goldorak doit se retourner dans sa tombe.
Faisant fi de cette honteuse absence, je me suis plongé dedans et je peux dire que les méchas ne m'ont pas manqué, bien au contraire.
Présentation de l'éditeur :
La Machine à indifférence de Project Itoh, Les Anges de Johannesburg de Yūsuke Miyauchi, Bullet de Toh EnJoe, Battle loyale de Taiyō Fujii et La Fille en lambeaux de Hirotaka Tobi composent la première anthologie de science-fiction japonaise traduite en français.
Sélectionnées par les deux meilleurs spécialistes français de la SF japonaise – Denis Taillandier, maître de conférence à l’université Ritsumeikan de Kyoto, et Tony Sanchez, traducteur de manga et chroniqueur chez ActuSF –, ces cinq nouvelles témoignent de la vivacité d’un genre qui mêle rigueur scientifique et créativité.
Mon ressenti :
Tiens, une anthologie de SF japonaise, voilà qui est plutôt rare dans
nos contrées. Si mes souvenirs sont bons, je n'ai lu qu'un roman japonais : La Submersion du Japon de Sakyō Komatsu. Anime ou manga oui, la SF
chinoise oui, mais la SF japonaise reste une grande inconnue pour moi.
Voici donc cinq nouvelles qui se passent au ... Pas
au Japon ! Voilà qui commence plutôt mal. Mais en y réfléchissant, c'est un peu con, voire très con, ma réflexion. C'est comme si je
demandais aux auteurs français de n'écrire que sur la France. Donc va
pour l'Afrique, les Etats-Unis ou la Chine avec cependant un
petit lien avec le Japon.
Alors je ne sais pour ma part si
la SF japonaise est différente de la SF (la préface dit clairement que oui) que l'on trouve de par le monde, ce que je
sais, c'est que j'ai plutôt apprécié la ballade, d'autant qu'il est
assez rare de se promener en Afrique et c'est une très bonne chose.
Haricot sur le gâteau, cette sélection est assez sombre dans son propos, ce qui n'est pas pour me déplaire.
Petit plus, une préface nous présente
l'histoire et le contexte de la SF japonaise tandis que la postface nous
éclaire sur les différents textes.
Parce qu'il faut bien mériter son pseudo, je trouve le prix de la version numérique trop cher, 13€ par rapport au prix papier de 19€. Par contre, pas de DRM et l'epub est dénué de coquilles et bugs divers que l'on rencontre trop régulièrement chez d'autres maisons d’éditions.
Deux autres textes figurent au catalogue de ce petit éditeur, Cette histoire est pour toi et Nuage orbital, ce dernier me faisant de l'oeil...
Allez, petit tour d'horizon
La machine à indifférence - Project Itoh
Futur très proche, en Afrique, après un conflit, nous suivons les pas d'un enfant soldat.
Comment se réadapter à la vie, comment côtoyer ses ennemis au quotidien après avoir été embrigadé ?
Voilà
un sujet malheureusement toujours actuel dont l'auteur nous brosse un
portrait très réaliste sans verser dans le macabre. Les relations
internationales et interethniques sont très bien rendues. Le Blanc se donne
bonne conscience, tandis que les anciens ennemis doivent composer avec leur
passé et leur présent. Un produit high tech permettrait d’apaiser les conflits, mais est-ce la bonne idée ?
Très bon texte où l'horreur est plus psychologique que réel.
Les hommes en blouse blanche étaient venus dans notre école un jour, et avaient fait passer des entretiens aux élèves fauteurs de troubles. En fait d’école, l’endroit était censé nous aider à nous réadapter à la vie civile. La Maison du Rire… en plus d’avoir un nom à pleurer, cet endroit était un vrai cauchemar. Les professeurs me donnaient la gerbe, avec leur morale : la guerre est finie, vous n’avez plus de raisons de vous battre ou de vous haïr, il est temps maintenant d’étudier et de travailler ensemble…
Ça va pas la tête !
La haine était toujours là, et c’était elle qui nous maintenait en vie. Elle ne pouvait pas disparaître d’un claquement de doigts, surtout dans un monde qui n’obéissait qu’à une règle : tuer ou être tué.
Les anges de Johannesburg - Yūsuke Miyauchi
Afrique
du Sud à Johannesburg, on suit les pas d'un enfant des rues qui tente
de survivre alors qu'un conflit interethnique fait rage. Dans son squat, un fait étrange se produit chaque jour, il pleut des filles...
Comment grandir dans un pays déchiré, comment tracer son chemin, espérer ou non ?
Un texte sombre, mais non dénué d'espoir. Si l'histoire se répète sans cesse, pourquoi lutter ? Pourquoi pas ? Très mélancolique à mon sens, un regard très triste sur l'humanité, mais qui résonne.
Bullet - Toh EnJoe
Nous
voilà dans une petite bourgade états-unienne bien étrange : une jeune
fille passe son temps à tirer dans sa demeure. Pendant ce temps-là, deux
jeunes hommes tentent de comprendre ce qui lui passe à travers la tête.
Une
anthologie sans voyage dans le temps ne peut être une bonne anthologie
de SF. De quoi se faire des noeuds au cerveau en s'amusant follement
avec ces hurluberlus et leur explication foutraque.
Malgré ce "non-sense", une certaine sensibilité se dégage de ces personnages atypiques.
Battle loyale - Taiyō Fujii
Nous
voici en Chine dans une boîte de jeux vidéo pour smartphone en
compagnie des employés, dont un qui est débogueur et passe ses journées
devant un mur de smartphones.
L'aventure va nous faire aller bien
loin que cette simple entreprise. J'ai été très agréablement étonné de
la tournure des évènements, qui progressent à chaque fois vers des
chemins surprenants. Ce texte m'a fait un peu penser à Chiens de guerre d'Adrian Tchaikovsky.
Ce
texte est de la SF militaire dans la lutte antiterroriste avec les
nouveaux jouets pour faire la guéguerre, mais reste très utopiste et
bienveillant.
Un bémol cependant, j'ai trouvé l'intrigue un peu
bancale, tiré par les cheveux avec de grosses ficelles, trop didactique
par moment. Mais je m'interroge sur le fait si ce texte ne fait pas des
références que je n'ai pas vu.
La fille en lambeaux - Hirotaka Tobi
Voilà pour moi le texte le plus dérangeant qui nous entraine dans une entreprise de réalité virtuelle qui bosse sur la possibilité de ressentir physiquement cette virtualité : goût, toucher, odeur...
Un texte non linéaire qui questionne la réalité et du rapport entre les individus. Le twist final aurait pu être amené de manière un peu plus percutante, mais j'ai apprécié ce voyage virtuel et en même temps détesté, l'auteur ayant réussi à me faire ressentir son texte. Perturbant, oui ! Percutant, oui !
Lune a passé un excellent moment à sa lecture, et le troll espère découvrir d’autres auteurs de science-fiction japonaise.
Y'a quand même une différence majeure entre la SF japonaise et la SF du reste du monde : la première est écrite par des auteurs japonais.
RépondreSupprimer(ne me remercie pas, c'est cadeau)
Voilà qui est tentant. Et s'il y a en plus un appareil critique...
RépondreSupprimerVive les appareils critiques, c'est tellement rare
Supprimer"Mais en y réfléchissant, c'est un peu con, voire très con, ma réflexion. C'est comme si je demandais aux auteurs français de n'écrire que sur la France." --> Oui, et pourtant, on s'attend tous à ça, et les éditeurs entretiennent ces attentes en s'y pliant, je trouve; les bouquins d'un pays donné qui se vendent à l'étranger sont souvent liés à ce pays, il a un rôle culturel dans l'histoire, comme si les auteurs de là-bas ne parlaient que d'eux...
RépondreSupprimerJe pense que ton analyse est bonne.
SupprimerUne anthologie SF japonaise qui se passe en Afrique où ailleurs c’est pas gênant pour moi.C’est vrai c’est pas courant,par contre j’aurais trouvé bizarre que l’auteur parle de samouraïs en Afrique. lol
RépondreSupprimerBattle loyale pourrait tout de même te surprendre, même si ce n'est pas des samourais.
SupprimerTrès tentant ce recueil. Merci pour ces éclaircissements sur son contenu.
RépondreSupprimerIl vous en prie
SupprimerCa a l'air sympa... Lune a à peu près le même avis que toi, je crois !
RépondreSupprimerOui, mais je crois qu'elle a copié sur moi ;p
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