Poumon vert



Ian R. MacLeod, Le bélial, 2017 (parution originale : 2002), 126p., 5€ epub sans DRM


Ou les quatre saisons d’Habara, l’une des planètes des Dix Mille et Un Mondes.
Un voyage immensément dépaysant dont il aura fallu 15 années standards pour le voir traduire.

Présentation de l’éditeur :

 

LORS DE SA DOUZIÈME ANNÉE standard, pendant la saison des Pluies Douces habarienne, Jalila quitte les hautes plaines de Tabuthal. Un voyage sans retour — le premier. Elle et ses trois mères s’installent à Al Janb, une ville côtière bien différente des terres hautes qui ont vu grandir la jeune fille. Jalila doute du bien-fondé de son déménagement. Ici, tout est étrange. Il y a d’abord ces vaisseaux, qui percent le ciel tels des missiles. Et puis ces créatures d’outre-monde inquiétantes, qu’on rencontre parfois dans les rues bondées. Et enfin, surtout, la plus étrange des choses étranges, cet homme croisé par le plus pur des hasards — oui, un... mâle. Une révélation qui ne signifie qu’une chose : Jalila va devoir grandir, et vite ; jusqu’à percer à jour le plus extraordinaire secret des Dix Mille et Un Mondes...

Mon ressenti :

 

Souvent dans le planet opera, du moins dans ceux j’ai lu, l’histoire nous est contée par un narrateur extérieur et humain. Ici non, le monde nous est conté par une adolescente, humaine mais pas tout à fait, à la recherche de son identité après un exil avec ses mères des hautes montagnes désertiques vers la civilisation. Un monde connu pour Jalila, mais qui garde tout de même une certaine étrangeté, les mœurs entre la ville côtière et le village des Hautes montagnes ne sont pas les mêmes.
Ce qui est connu de Jalila nous est inconnu et seul l’inconnu de Jalila nous sera conté, ce qui laisse planer le mystère sur pas mal de points.



Habara, une planète à la mesure du temps différente de la nôtre, médiévale et futuriste, où l’alliance entre vivant (humain, faune et flore) et technologie semble très développé mais où la technologie est peu prégnante et la nature partout. La distinction entre humain, nature et technologie est floue, parfois symbiotique.
Une société matriarcale, non même pas, le mâle y est inexistant, d’inspiration orientale. Un monde aux habitants étranges, melting pot, humain et non humain.
Ian R. macLeod nous peint un monde où l’on perd pied, nos normes n’ayant plus court dans ce dernier, ce qui lui permet de jouer avec nos représentations sur l’islam, l’identité sexuelle et sa norme. Même les genres s’emmêlent entre fantasy et science fiction, même si le récit est de la SF. A chaque page, une imagination à foison, une construction d’univers immense et pourtant un récit qui reste ancré dans l’humain.

Un texte résolument étrange, exotique, réaliste et dépaysant qui nous conte le parcours de vie de
Jalila, de ses choix, de son exil et de son intégration aussi et des autres.
J’ai beaucoup pensé à Ursula Le Guin durant ma traversée d’Habara.
J’aurais aimé que cette novella soit un roman, le potentiel étant immense et le survol un peu rapide.
Un texte qui demande une immersion totale de votre part et dont la SF vous renversera la tête. Pour ma part, une impression mitigée du fait du choix de l’auteur d’utiliser parfois un vocabulaire inédit sans en donner d’explications, rendant l’atmosphère certes exotique, mais aussi une immersion plus lente.
Un texte dont les sentiments sont assez présents. L’amour et moi étions fâché en littérature, il y a quelques passages dont je me serai passé même si ils ont leur intérêt dans la psychologie du personnage et que la mièvrerie y soit absente. Et cela reste un récit d'initiation.
Mais moi je suis un chien, alors les affres des humains, je m'en bats la queue. Si vous êtes de cette engeance qui se tient en position verticale, alors vous pourrez y trouver votre bonheur.
J’aurais préféré aussi que soit plus développé l’aspect autour de la société féminine décrite par l’auteur : quel impact sur la société ? Mais encore une fois, il s’agit d’un parti pris de l’auteur.
Donc des bémols personnels qui pourront autant vous déplaire que vous plaire.

Ian R. MacLeod est un auteur rare – extrêmement rare en français - donc vous devrez patienter encore une quinzaine d’années avant de pouvoir espérer le relire. Mais mon côté concierge me dit qu’une nouvelle dans le même univers paraitra dans un futur Bifrost (source dans les commentaires).

Je ne salue pas le travail de traduction, je ne l'ai pas remarqué.
(allusion à l'interview de Michelle Charrier dans le Bifrost n.86)

Apophis y a décelé du Frank Herbert, du David Brin et du Ann Leckie
Lecture 42 y a fait une balade onirique et contemplative.
Et l’ours inculte y a découvert un nouveau genre : la SF des mille et une nuits

Lu dans sa version papier (et heureusement au vue de la magnifique couverture) et critiqué dans le cadre d’une opération Masse critique Babelio

2 commentaires:

  1. "alors les affres des humains, je m'en bats la queue" carrément !

    Faut pas être fâché comme ça et encore moins avec l'amour ! C'est vrai que c'est rarement réussi ces choses la.

    Belle analyse pour cette novella atypique.

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    1. Tu connais le proverbe : tend la main à un chien, il te mord la main !

      Merci pour le compliment

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