Bifrost n.45. Dossier Robert Charles Wilson - Greg Egan

Bifrost, Le Bélial, 2007, 192 p., 11€ papier

 

Un vieux Bifrost consacré à Robert Charles Wilson. Mais le dossier se résume juste à une interview. Cependant, vous pourrez bénéficiez de deux autres, celle de Dantec et de Greg Egan avec même une analyse de son oeuvre.
Et pour le même prix, une couverture assez spéciale dont je me demande encore qu'elle est le rapport avec le contenu.

Interstyles


Divisé par l'infini, de Robert Charles Wilson
L’année qui a suivi la mort de Lorraine, j’ai envisagé six fois de me suicider. Envisagé sérieusement, je veux dire : je me suis installé six fois avec le gros flacon de clonazépam à portée de main et j’ai échoué six fois à le prendre, trahi par un instinct de survie ou dégoûté par ma propre faiblesse.
Je ne peux pas dire que je souhaite avoir réussi, parce que selon toute probabilité, j’ai bel et bien réussi, j’ai réussi à chaque fois. Six morts. Non, pas seulement six. Une infinité.
Fois six.
Il y a des infinis plus ou moins grands.

Le mari d'une salariée décédée de la librairie Finders y découvre des éditions anciennes de livres SF d'auteurs connus mais dont les titres semblent faux. Wilson nous invite dans l’étrange avec une plume agréable et subtile. Puis vient l'explication sur cette étrangeté des titres inconnus et là le lecteur est emmené dans un monde hommage à la SF.
Le mot magnifique de l'auteur sur cette nouvelle (dans le recueil Les perséides chez le même éditeur)
« Divisé par l’infini » a figuré cette année-là parmi les finalistes du prix Hugo, non, j’imagine, parce que c’est une nouvelle particulièrement originale ou réussie, mais parce que j’essayais si fort de pincer la corde fondamentale de la science-fiction qu’elle a fini par vibrer un instant.
(Avis extrait de mon ressenti sur le recueil Les Perséides)

Ivoire équarri, de Luc Dutour (pseudonyme collectif partagé par Johan Heliot et Xavier Mauméjean)
Emile Coué , le Pharmacien quantique et Joseph Poujol, dit le Pétomane sont deux agents de la Section des Statistiques dans leur troisième aventure. Contre espionnage pour sauver la France et ses colonies face à l'affreux Babar. Mouaih est le mot le plus sympathique de mon vocabulaire pour décrire cette nouvelle.


Yeyuka de Greg Egan
Monsieur hard SF nous emmène en Ouganda dans un futur proche. Alors que la technologie des pays riches a connu un essor phénoménal (fini les maladies, les accidents), les pays pauvres continuent de trinquer. Un médecin désoeuvré vient leur "apporter son aide" pour quelques mois.
L'auteur évite le regard hautain ou condescendant sur l'Afrique, et nous parle de l'engagement humanitaire de l'homme occidental face aux pays pauvres d'une manière très réaliste avec une chute splendide. Pas de jargon scientifique ici, juste l'humain face au mépris de l'industrie pharmaceutique.
Une nouvelle que vous pouvez lire ici ou dans le recueil Océanique

Cela ne faisait pas la moindre différence que je me sois porté volontaire vraiment par compassion ou à cause d'un certain manque de confiance en moi-même par crainte de mon obsolescence à venir. De toute manière, j'étais venu avec mes deux mains et une expérience suffisante de la chirurgie générale pour me rendre utile. S'il avait fallu être un saint pour guérir quelqu'un, la médecine aurait été condamnée dès ses débuts.



Ballades sur l’arc

Suit le fameux Cahier critique sur l'actualité du genre SF. Des avis toujours tranchés, il y a des choses qui ne changent pas, parfois très long (4-5 pages) comme celui sur Chasseurs de chimères qui me fait de l'oeil, ou Le papillon des étoiles de Bernard Werber qui en prend pour son grade. Le seul livre lu des recensions est Un choeur d'enfants maudits qui s'était révélé très, trop, glauque pour moi. Bref, peu de livres ont accédé à la prospérité depuis, à part quelques uns, dont Spin.
La chandelle de Maître Doc Stolze, rubrique défunte, s'attarde sur quelques livres de l'imaginaire parue en blanche.
Thomas Day était déjà en charge du coin des revues (et fanzines), lui non plus n'a pas changé.
Maurice Dantec parle à la Terre, un titre qui résume bien l'interview du feu provocateur et controversé écrivain. Très cultivé, ce qui n’empêche pas les idées nauséabondes.
Greg Egan ou la philosophie de la science nous offre une interview et une analyse de l'oeuvre et de sa métaphysique. Une pensée à l'opposé de Dantec. Et Denis Labbé n'a pas souffert d'une fin de non recevoir...

Au travers du Prisme : Robert Charles Wilson, des hommes et des idées

 « difficile », c’est quand on doit faire face, dans une cabine d’ascenseur, à un militariste de cent cinquante kilos qui tient votre œuvre pour « anti-américaine ».


Wilson, c'est le voisin idéal, pas envahissant, modeste et toujours prêt à dépanner. Son seul défaut, c'est d'être barbu, mais accordons lui qu'il l'a été bien avant tout ces hipsters,
Une interview intéressante, instructive par certains côtés, bien que l'auteur reste volontiers très évasifs sur certaines questions.

Je me souviens aussi qu’on m’emmenait dans une boutique où régnait l’odeur enivrante de la pulpe de papier et où je couvais du regard les couvertures de Galaxy et du Magazine of Fantasy and Science Fiction. On m’interdisait de les acheter, mais j’en avais une envie presque sexuelle.

De Bob Chuck Wilson en passant pas Robert Charles Wilson, désormais son patronyme seul suffit à tout amateur de SF. Alors qui est Wilson ? Élève médiocre, pourquoi s'est il mis à l'écriture ? Première nouvelle publiée en 1975 à 19 ans, premier roman 15 ans plus tard, quelles ont été ses influences, quel regard porte t-il sur ses textes de jeunesse ? Quel a été son premier texte Wilsonien ?
Quel est son film SF préféré ? Vous serez tout sur le canadien grâce à cette entretien que vous pouvez lire en ligne.

Mon goût pour la S-F et le fantastique date de ma si tendre enfance qu’il me paraît presque génétique, comme le phototropisme du tournesol. Je ne sais pas d’où il me vient, franchement.
Le dossier famélique se termine par une bibliographie. Greg Egan a eu une deuxième chance avec un vrai dossier il y a peu, à quand un vrai dossier Wilson ?


Ce qui définit la S-F, à mon avis, c’est son souci de l’imprévu. Le monde actuel était très différent dans le passé ; le présent aurait pu se révéler très différent selon l’évolution des événements ; et le futur sera forcément différent du présent. Ce sont là des idées simples, mais elles abondent en possibilités littéraires. Pour moi, le paradoxe est inverse : l’apocalypse n’a rien d’apocalyptique si c’est le Capitaine Futur qui la vit.
La couverture originale de Julian. Magnifique.

Les anticipateurs
L'histoire de la SF en feuilleton dans votre revue préférée avec pour ce numéro une analyse de l'oeuvre du comte Villiers de l'Isle Adam, qui nous a offert les Contes cruels, et L'Eve future où le premier androïde fera son apparition en 1880. J'avais repoussé la lecture de ce roman plusieurs fois, j'ai bien fait : très romantique, difficile d'accès, et empreint de mysticisme. bref, pas ma camelote.

Scientifiction

Roland Lehoucq et Claude Ecken dialogue sur la faisabilité de construire une arche stellaire. Pas si simple, le prouve cette deuxième partie : masse, propulsion, freinage, carburant, nourriture pour un voyage de 300 ans...

Razzies 2007
Ce numéro se termine par les Razzies 2007 : le prix du pire, sobrement sous titré : bienvenue chez les éditeurs qui prennent les lecteurs pour des cons.
Razzies qui prendront leur retraite après 10 ans de bons et loyaux services dans le numéro 65. Mais pour les plus jeunes, vous pouvez vous faire une idée en lisant les résultats de cette période.
Plein de mauvaise foi, de vérités rarement exprimées au grand jour, de taquineries, ces prix étaient un bol d'air frais pas au gout de tout le monde. Bref, tout les éditeurs en prenaient pour leur grade, ennemi comme ami, et je crois me rappeler que même Le Bélial en faisait les frais de temps en temps.
Nous avons le droit désormais au Prix des Lecteurs Bifrost, beaucoup moins drôle... A quand un courrier des lecteurs ?

2 commentaires:

  1. Tiens comme je ne suis pas surprise!!!
    C'est sans doute un petit régal pour toi. Il faudra que je regarde si je n'ai pas ce numéro en rayon. 2007 est la période à partir de laquelle je me suis abonnée. Cependant, je ne sais pas si je le possède ou pas.

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    Réponses
    1. C'était le premier numéro de 2007, donc le doute est permis. Et puis un Bifrost sur RCW, tu t'en rappellerai...
      Ce numéro est un peu frustrant, malgré une bonne interview. Un goût de trop peu.

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