Bifrost n.94. John W. Campbell : façonneur d'âge d'or


Bifrost, Le Bélial, 2019, 192 p., 6€ epub sans DRM


Si vous trainez parfois sur la page Facebook du Bélial, vous savez que l'équipe éditoriale aime le whisky. De là à lui consacrer un dossier, il y a un pas allègrement franchi ici. Le rapport avec la SF ? Si tu ne le voies pas, c'est que tu es très jeune et que ta culture SF a encore quelques progrès à faire. En lisant ce numéro, tu apprendras que le clan Campbell ne se résume pas à cette boisson alcoolisée.


Nouvelles


Les Choses à barbe, de Sam J. Miller
Une présentation alléchante pour cette nouvelle :

Dossier John Campbell oblige, « Les Choses à barbe » propose une suite à The Thing, le film de John Carpenter, et donc, somme toute, à la novella « La Bête d’un autre monde » (aka « Who Goes There »). Un texte assez stupéfiant où Miller réalise une prouesse inédite : lier le récit campbellien à la problématique du sida, de la « gayitude » et de la condition des Noirs outre-Atlantique. Rien que ça.

MacReady est de retour chez lui, mais il a la mémoire pleine de trous. Sur fond de lutte des Noirs et de Sida, je suis passé complètement à côté de ce texte. Le style de Sam J. Miller n'est définitivement pas pour moi.

Les Nouvelles Aventures de Flip-Flop, de Laurent Queyssi
Un auteur se demande si il doit reprendre les aventures d'un célèbre personnage de BD, alors que son créateur avait clairement stipulé sa volonté que son oeuvre s'arrête à sa mort. Entre respect de l'oeuvre original, contrat mirobolant, difficile de faire son choix.
Un texte dans la veine fantastique qui ne me laissera pas un souvenir impérissable, mille milliards de mille sabords.


Le Triangle de Lavrentiev, de Michael Rheyss
Suite du cycle entamé dans le numéro 90 consacré à Edmond Hamilton que j'avais beaucoup apprécié, ce fut moins le cas ici, Michael Rheyss s'attardant sur un épisode, imaginaire, de la vie de Asimov, auteur que je ne connais pas. Ceci dit, j'aime bien l'idée sous-jacente, ce complot dont certains auteurs de science fiction sont investit.


Le ciel est mort, de John W. Campbell 
Le dossier nous dira plus loin que Campbell est l'un des pères de la Hard-SF, je m'attendais donc à une certaine plausibilité scientifique, ce qui ne me semble pas être le cas ici.
Un astronaute en devenir se retrouve projeter dans un monde froid où le ciel semble mort. N'ayant pas adhérer à la spéculation, j'ai eu du mal à entrer dans son univers et cela est un peu old school.


Ballades sur l’arc

Pas grand chose à me mettre sous la dent, que ce soit en revues ou en romans, j'y ai repéré tout de même Sixième du crépuscule et autres nouvelles, de Brandon Sanderson. En outre, j'avais envie de me plonger dans Les hommes frénétiques, l'avis présent en ligne confirme mon intérêt


Paroles de... la donne à Philippe Gady, illustrateur durable, collaborateur régulier au Bélial, un artisan qui préfère le papier à Photoshop. Il nous dévoile sa manière de travailler, et aussi ses autres centres d’intérêt.
 
Dans le fond, je ne cherche pas à faire reconnaître ma personnalité à travers un style « particulier » : mon principal moteur est de savoir mettre en valeur le sujet qui m’a été confié ; je ne signe d’ailleurs jamais ce que je fais

Au travers du prisme : John W. Campbell 


Six articles et une bibliographie composent le menu. Francis Valéry ouvre le feu en abordant le parcours de l'homme. Aborder est bien le terme adéquat tant j'ai trouvé que l'article se contentait à  être une longue liste de parutions, de résumés, plutôt qu'une analyse de la biographie et bibliographie. Qui est il dans la vie privé, comment a t'il changé le visage de la SF américaine ? Beaucoup trop survolé à mon goût.
Theodore Sturgeon, dans un texte de 1954, nous livre sa vision de son éditeur, un exercice qui tombe dans l'hagiographie, mais dont quelques passages permettent un aperçu de la SF d'alors, même si certaines choses ne changent pas :

Lorsque quelqu’un lui demande pourquoi il s’adonne à ce genre de littérature, l’écrivain de science-fiction n’a qu’à répondre : « Il faut bien vivre. » Voilà une vérité nouvelle qui a le mérite de satisfaire beaucoup d’écrivains et la plupart de leurs interlocuteurs.

Suit le regard de Campbell sur ce qu'est un bon texte de SF. Ecrivaillons du monde entier, prenez note et vous pondrez un texte qui fleure bon les années 30-50. Blague à part, il y a pas mal de choses que je trouve toujours d'actualité et de bon sens. Mais bon, je ne suis pas éditeur. Dommage que je n'ai pas lu les textes dont parle le sieur pour me faire une véritable opinion.
Campbell est un tout de même un sacré personnage, citant abondamment des textes qu'il a écrit sous pseudo. Égo quand tu nous tient, ...

Une idée n’a d’importance qu’au regard de la façon dont elle réagit aux gens et dont les gens y réagissent. Qu’elle soit sociale, politique ou mécanique, nous voulons que l’idée implique les gens.

Enfin, voici la plus grande des règles, la raison pour laquelle 99% des histoires écrites ne sont pas achetées par les éditeurs : ces derniers n’achètent jamais les manuscrits qui dorment dans les tiroirs. Si vous avez pris la peine d’écrire une nouvelle, envoyez-la-nous !

Tous lecteurs de SF adepte du genre connait Campbell, du moins de nom, mais peu de lecteurs français ont lu de ses textes, ces deniers n'ayant eu que peu l'honneur d'une traduction. La majorité se trouvent dans le recueil Le ciel est mort. Philippe Boulier nous livre une analyse de ces quelques textes, parfois mis en parallèle avec des textes non traduits. Cela donne envie de sortir ce recueil des limbes digitales de ma liseuse où il se trouve.

Suit un focus The thing, à travers la nouvelle originale La Bête d'un autre monde, ainsi que sur les trois adaptations cinématographiques par Thomas Day, le digne héritier de Campbell dixit Francis Valéry :

L’histoire de la science-fiction est jalonnée de figures d’écrivains-éditeurs, des personnalités fortes qui, menant une double carrière, ont marqué l’histoire du genre (en France, on pensera avant tout à Gérard Klein, mais on pourrait tout aussi bien citer Alain Dorémieux, Michel Demuth, voire, plus près de nous, notre collaborateur Thomas Day/Gilles Dumay…).

Un bien bel article qui analyse finement la nouvelle et ses adaptations. Pour ma part, j'avais plutôt bien aimé l'adaptation de 2011.
Je vous invite grandement à vous organiser un voyage polaire depuis votre canapé. Et en plus j'ai appris quelques anecdotes et une chose à propos de la nouvelle La Bête d’un autre monde :

Il en existe aussi une version longue, le court roman Frozen hell, retrouvé récemment, qui a donné lieu à l’automne 2018 à un kickstarter au terme duquel 155 366 dollars ont été réunis pour sa publication.

Le dossier se clôt par 4 extraits de lettres adressés à la team des auteurs campbelliens. Me laisse l'idée d'un homme logique, et froid, qui aime s'entendre parler.
Une bibliographie referme le tout



Scientifiction


Frédéric Landragin et Roland Lehoucq vous disent tout sur l'appareil photo, la photo et son utilisation dans la littérature (comme sujet ou procédé arratif) et le cinéma SFFF. Et ils nous dévoilent comment faire des phototrucages avec des soucoupes volantes, des ET ou encore des lutins.


Les derniers Bifrost numériques avaient tout de la mauvaise blague, l'équipe a réagit ici. Pas parfait, il y a encore quelques petits couacs ici et là, mais rien qui n’empêche sa lecture. Vous avez les encouragements du Chien critique.



17 commentaires:

  1. J'ai presque fini ma lecture de ce numéro, il me manque la nouvelle de Campbell et le Scientifiction. J'aime beaucoup ton intro avec le whisky!

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    1. Merci.
      J'étais étonné de ne pas voir fleurir les avis des uns et des autres, les vacances sûrement. J'aime comparer les ressentis des divers lecteurs.

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    2. Je t'avoue que moi aussi :)
      Pour les nouvelles, j'ai bien aimé celle de Sam Miller contrairement à toi mais je peux comprendre qu'on aime pas, c'est un peu particulier comme style

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    3. Et j'ai aussi l'impression qu'ils revient toujours sur les mêmes sujets.
      Mais bon, c'est le lot commun de nombreux auteurs...

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  2. Je lance dès à présent une pétition pour que ce Bifrost soit renvoyé à chacun avec un magnifique bandeau rouge citant ton introduction.

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  3. Bigre ! Moi qui pensais être un lecteur de SF adepte du genre, je n'avais jamais entendu parler de ce John W. Campbell !

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    1. On en apprend tous les jours, c'est pour ça que la vie est belle !

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  4. J'adore ton intro!!!

    Les nouvelles sont sympas, mais rien qui fasse vraiment palpiter la tripaille.
    Le dossier est top.

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    1. Merci.
      Oui, les nouvelles ne seront pas celles qui resteront dans les annales de la revue.

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