Eriophora

Peter Watts, 2020, Le Bélial, 224 p., 9€ epub sans DRM

 

Le chimpanzé tisse sa toile...

 

Présentation de l'éditeur :


Ils sont trente mille.
Ils voyagent depuis soixante millions d’années.
Leur mission : déverrouiller la porte des étoiles…
Avez-vous jamais pensé à eux ?
Aux Progéniteurs, aux Précurseurs — qu’importe le nom que vous leur avez choisi cette semaine —, ces dieux anciens disparus qui ont laissé derrière eux leurs portails et leurs autoroutes galactiques pour votre plaisir ? Avez-vous jamais cessé de vous demander ce qu’ils ont vécu ?
Pas d’hyperespace de seconde main pour eux. Pas d’épaules de géant sur lesquelles se dresser. Ils rampent à travers la galaxie, pareils à des fourmis, en sommeil pendant des millénaires, se réveillant juste assez longtemps pour lancer un chantier d’un système solaire à l’autre. Ils vivent au fil d’instants répartis le long des millions d’années, au service d’ancêtres morts depuis une éternité, pour des descendants n’ayant plus rien de commun avec eux. À vrai dire, ce ne sont pas des dieux mais des ouvriers, des hommes des cavernes vivant dans des astéroïdes évidés, lancés dans une mission sans fin pour étendre un empire posthumain qui ne répond même plus à leurs appels…


Mon ressenti :


Tragédie en 6 actes avec prologue et épilogue.

Parfois, on ne trouve pas de travail près de chez soi. Et les chantiers d'autoroutes demandent toujours plus de main d’œuvre... Alors on prend la route et on laisse sa vie par derrière. C'est ce qui arrive  Sunday, dans un très lointain futur sur son engin de travaux publics un peu spécial : un gros caillou comme vaisseau, pondant des trous de vers. Mieux qu'un long discours, le schéma



L'espace temps et une notion bien complexe. Ici en deux pages, l'auteur nous fait vivre ce qu'est cette dimension temporelle immense, inimaginable, incommensurable.

Huis clos classique de l'espace, des humains en hibernation, l'IA ne les réveillant qu'en cas de problème. Une vie en pointillé, quelques jours de vécu entre deux millénaires. Mais lorsque les millions d'années s'écoulent, difficile de ne pas éprouver de solitude, de nostalgie pour cette bonne vieille Terre. Alors on rumine... Et les emmerdes commencent.

Peter Watts est un auteur de hard-SF et bien que ce texte soit intelligible pour l'amateur éclairé, je ne pense pas qu'il puisse l'être pour des lecteurs non aguerris en science-fiction. Il suffira donc de lire encore un peu pour faire la connaissance de ce Chimp, l'Intelligence Artificielle du vaisseau, qui est loin des standards froids que l'on connait habituellement. Mais connait on réellement la psychologie des IA ? L'Homme peut-il se fier totalement à une machine, fût elle intelligente ?

Je savais que les choses devaient changer. Je savais que mon stupide attachement affectif à un logiciel m’avait cachée que nous étions, au bout du compte, des outils à utiliser et jeter au gré de la fonction utilitaire d’un ingénieur mort.

Une révolution est-elle possible dans ces conditions ? Peter Watts nous donne sa réponse qui m'a bien plu. Ça se lit tout seul, on a envie de savoir comment tout cela va se terminer, où nos révolutionnaires vont se la faire mettre à l'envers. Des questions, de l'intelligence, une atmosphère étouffante et un combat IA/Femme, qu'est ce que tu attends pour le lire ?
Un texte non dénué de poésie scientifique, parsemé de touches d'humour noir propre à l'auteur, comme ce "Pour servir au mieux les intérêts de la mission"

 

Nous arrivions sur la passerelle, seuls ou à deux, nous nous regroupions autour de notre Némésis en jouet miniature et la regardions pétrifiés. Ce disque mortel de gaz incandescent. Cette minuscule gueule noire en plein milieu, des étoiles lointaines s’étalant sur son pourtour comme autant de taches lumineuses. Le collier ténu en hyperdiamant allant d’ici à là, convoyeur gravitationnel ne cessant de récolter sur l’ergosphère de précieuses aliquotes d’énergie qu’il rapportait à nos accumulateurs. Un demi-million d’unités flirtant avec l’anéantissement : l’usine entière, dispersée, en mouvement constant, chaque processeur et raffinerie et fabricatrice se regroupant en agrégations assez complexes pour vous donner mal à la tête. Nous les regardions sans mot dire, parfois des heures durant, hommes des cavernes regroupés autour d’un feu de camp qui trouvait le moyen de nous laisser transis de froid.

 

Eriophora fait partie d'un ensemble de nouvelles, les autres se trouvant dans le recueil Au-delà du gouffre. Dans quel ordre les lire ? Le Bélial te dit tout :

Si on veut les lire dans l'ordre de la chronologie interne, mieux vaut commencer par la nouvelle « Éclat » puis poursuivre avec Eriophora, « Géantes » et « L'Île ».
L'ordre de publication est lui aussi intéressant, bon nombre d'infos étant données dans cette « Île » initiale, et c'est la raison pour laquelle c'est cette nouvelle qui introduit la partie dédiée dans Au-delà du gouffre.

Cerise sur le gâteau, un petit jeu se cache dans les lignes du roman, permettant de prolonger le final.

Les avis des uns, des unes et des autres sur le forum du Bélial 



Allez, je vous laisse en compagnie d'autres ouvriers de l'autoroute :


 

 

9 commentaires:

  1. Tu vois que tu te fais à mon auteur favori!

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    1. Il ne dit pas que des conneries, mais le problème, c'est que parfois il les dit de manière incompréhensible.

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  2. J'ai vraiment adoré l'univers de l'auteur que ce soit sur cette novella ou sur les nouvelles.

    Par contre je suis hermétique aux autres écrits de l'auteur.

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    1. Pas tout lu de l'auteur, loin de là, mais oui, c'est parfois assez hermétique au non initié hard-SF

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  3. Intéressant... mais du coup si j'ai lu L'île en premier j'ai tout bon ? Ou pas ...

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    1. Je répond à la place du chien : Oui, c'est l'ordre d'écriture et probablement la meilleure nouvelle.

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    2. C'est Peter Watts, on ne comprends rien ! Donc peu importe l'ordre ;p

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  4. "Mieux qu'un long discours, le schéma" : euh... je peux avoir le long discours plutôt, ou c'est encore moins compréhensible ?

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