Monstrueuse Féérie
Laurent Pépin, Fables fertiles, 2022, 120 p., 16€ papier
Pitch de l'éditeur :
L’esprit, redoutable, sait composer avec les normes, ou peut parfois les subir cruellement, pour peu que les Monstres se soient invités et qu’il les ait laissés entrer. Il peut vite s’enfoncer alors dans d’insondables méandres, sauf à recourir, comme les Monuments s’y emploient, à la décompensation
poétique, ou mieux encore à avoir su entrer en intimité avec une Elfe.
Monstrueuse féérie est le premier volet de trois d’un conte insolite et fascinant tout entier parcouru d’un imaginaire de luttes sublimées visant à « se tenir debout face aux vivants ». La monstrueuse beauté de tout un univers halluciné nous hèle puissamment pour une fugue hypnotique, admirable.
Avec ce récit, Laurent Pépin nous tend un miroir d’ombres fabuleuses, particulièrement attachantes, qui attestent de la fragilité de l’entendement et nous invitent à nous départir d’une Normalité trop souvent déployée tel un drapeau magistral, arrogant.
Mon ressenti :
Toujours, je laisse une fenêtre ouverte pour que les Monstres puissent entrer. Je ne le fais pas vraiment exprès.
Tous les Monstres rentrent dans toutes les têtes de la même façon : on les y invite. Quelque chose nous fascine en eux, nous comble, ou du moins absorbe notre esprit logique. Ils polarisent nos réflexions. Quand ils sont là, c’est trop tard : ils ne sortent plus, et la terreur s’immisce, grandit.
Quand il vidait des animaux pour les empailler, il y avait dans la maison une odeur épouvantable. Certes, il était occupé, et ça avait l’air de l’intéresser, vraiment. C’était bien, comme activité, pour le père. Par contre, il nous regardait du coin de l’œil, et ça me faisait peur. Je me disais qu’il pesait le pour et le contre.
Même si je sais que mes histoires sont un peu… un peu…, mais ce ne sont pas des mensonges ! Ce sont des métaphores. C’est mon histoire, c’est moi qui raconte. Je n’ai pas le choix, de toute façon. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire autrement. Et puis je ne veux pas. Ce n’est pas la direction que j’ai choisie. Il faut bien reconstruire le monde à sa façon, on ne peut quand même pas le prendre tel qu’il est, c’est trop triste. Tu prends le ciel, les nuages, les oiseaux, ce que tu voudras, ça n’a aucun sens si on n’y invente pas autre chose avec, un peu d’accent dans le regard qu’on y met. C’est vrai, c’est nul, la nature naturelle. Et puis c’est à ça que ça sert, de raconter des histoires, depuis des milliers d’années. Il faut bien s’en servir. Tant que j’invente, je suis à l’abri, je ne me confonds pas avec mon récit. Qu’est-ce que je deviendrais, sinon ? Je dériverais au fil de mes histoires, bringuebalé comme un morceau de bois sur la rivière ? Alors c’est vrai qu’il y a des histoires qui sortent de ma tête. J’en empreinte à gauche, à droite, je les mélange avec les miennes. Mais c’est comme ça que je combats les Monstres, moi, en lançant des histoires au ciel que je regarde voler comme des oiseaux. De toute façon, la vérité, c’est comme la fin du monde. J’y suis allé, moi, à la fin du monde. Seulement, il ne faut pas croire, il n’y avait rien, après.
Je me disais bien que tu avais déjà mangé de ce plat. Il y a de vraies différences dans la recette du coup ? Ce n'est pas juste le restaurant qui change, tu as senti de nouveaux ingrédients ?
RépondreSupprimerJe n'ai pas fait de lecture comparés, ce sont surtout des petits changements dans la tournure des phrases. Et je crois aussi que la partie sur la mère est différente.
SupprimerMais du coup qu'est-ce qui a changé? Plus d'épices? J'ai beau détester les brocolis moi aussi, je reste tentée d'y gouter
RépondreSupprimerJ'avais encore quelques mots en tête de l'ancienne éditeur, et je suis conservateur. Mais cela ne change pas grand chose, sauf que le livre a une deuxième vie et semble rencontrer plus de visibilité et de succès.
SupprimerL'amour comparé à des brocolis fallait oser. J'adore ta critique!
RépondreSupprimerJe n'aime pas la romance.
Les romances brocolis, c'est cool
SupprimerEt bien, ça a en tout cas l'air d'être assez original, cette affaire de brocolis ! Belle chronique !
RépondreSupprimerMerci, je vais cependant aller me faire psychanalyser, car c'est assez bizarre cette histoire de brocolis !
SupprimerLes salsifis devraient paraître en octobre 😉
SupprimerJ'en salive d'avance
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