Monstrueuse Féérie

 

Laurent Pépin, Fables fertiles, 2022, 120 p., 16€ papier

 

Où je vous parle de brocolis...

 

Pitch de l'éditeur : 

L’esprit, redoutable, sait composer avec les normes, ou peut parfois les subir cruellement, pour peu que les Monstres se soient invités et qu’il les ait laissés entrer. Il peut vite s’enfoncer alors dans d’insondables méandres, sauf à recourir, comme les Monuments s’y emploient, à la décompensation
poétique, ou mieux encore à avoir su entrer en intimité avec une Elfe.
Monstrueuse féérie est le premier volet de trois d’un conte insolite et fascinant tout entier parcouru d’un imaginaire de luttes sublimées visant à « se tenir debout face aux vivants ». La monstrueuse beauté de tout un univers halluciné nous hèle puissamment pour une fugue hypnotique, admirable.
Avec ce récit, Laurent Pépin nous tend un miroir d’ombres fabuleuses, particulièrement attachantes, qui attestent de la fragilité de l’entendement et nous invitent à nous départir d’une Normalité trop souvent déployée tel un drapeau magistral, arrogant.


Mon ressenti :

Une histoire d'amour, de la psy-(chanalyse)(chologie)(chiatrie), de la poésie : bref, un condensé de ce que je déteste lire.
C'est comme les brocolis, c'est dégueulasse et pourtant j'en mange et c'est parfois très bon. Même que je me régale. Et que j'en redemande. Car tout n'est pas dans les ingrédients, la recette et le talent du cuisinier feront que le plat est digne de Flunch, ou d'un restaurant étoilé...
 
Toujours, je laisse une fenêtre ouverte pour que les Monstres puissent entrer. Je ne le fais pas vraiment exprès.
Tous les Monstres rentrent dans toutes les têtes de la même façon : on les y invite. Quelque chose nous fascine en eux, nous comble, ou du moins absorbe notre esprit logique. Ils polarisent nos réflexions. Quand ils sont là, c’est trop tard : ils ne sortent plus, et la terreur s’immisce, grandit.

Monstrueuse Féérie, c'est des brocolis délicieux, cueillis juste à maturité, choisis avec passion. De petites fleurettes tendres et légèrement croquantes. Sublimés à la vapeur d'un bouillon d'une culture foisonnante. Le cuistot a su capturé l'essence des ingrédients pour un faire plat unique, indéfinissable et dont les saveurs restent longtemps en bouche et en mémoire.

Quand il vidait des animaux pour les empailler, il y avait dans la maison une odeur épouvantable. Certes, il était occupé, et ça avait l’air de l’intéresser, vraiment. C’était bien, comme activité, pour le père. Par contre, il nous regardait du coin de l’œil, et ça me faisait peur. Je me disais qu’il pesait le pour et le contre.

Lorsque je regarde des émissions culinaires avec de grands chefs étoilés, je les entends toujours dire qu'un plat est une histoire, et sans histoire, pas de bons plats. Ce qui m'a toujours fait bien marrer : des histoires pour péter plus haut que son cul ! Mais un jour devant cette assiette de brocolis, j'ai su que c'était vrai. J'ai su capter la malice du cuisinier, qui a exploité avec talents les combinaisons d'épices (noires) pour en révéler le parfait accord.

C'est la parfaite recette. Et c'est toujours un plaisir que de retourner dans ce troquet déguster ces brocolis. Ici, le chef a révisé sa recette initiale pour lui donner une subtile variation, tout aussi délicieuse. Il parait qu'il va concocter d'autres recettes, cette fois avec des épinards et une autre avec des choux de Bruxelles. Et vous savez quoi ? Je suis très impatient d'y goûter.
 
En conclusion, les brocolis, c'est délicieux, mangez-en !


Même si je sais que mes histoires sont un peu… un peu…, mais ce ne sont pas des mensonges ! Ce sont des métaphores. C’est mon histoire, c’est moi qui raconte. Je n’ai pas le choix, de toute façon. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire autrement. Et puis je ne veux pas. Ce n’est pas la direction que j’ai choisie. Il faut bien reconstruire le monde à sa façon, on ne peut quand même pas le prendre tel qu’il est, c’est trop triste. Tu prends le ciel, les nuages, les oiseaux, ce que tu voudras, ça n’a aucun sens si on n’y invente pas autre chose avec, un peu d’accent dans le regard qu’on y met. C’est vrai, c’est nul, la nature naturelle. Et puis c’est à ça que ça sert, de raconter des histoires, depuis des milliers d’années. Il faut bien s’en servir. Tant que j’invente, je suis à l’abri, je ne me confonds pas avec mon récit. Qu’est-ce que je deviendrais, sinon ? Je dériverais au fil de mes histoires, bringuebalé comme un morceau de bois sur la rivière ? Alors c’est vrai qu’il y a des histoires qui sortent de ma tête. J’en empreinte à gauche, à droite, je les mélange avec les miennes. Mais c’est comme ça que je combats les Monstres, moi, en lançant des histoires au ciel que je regarde voler comme des oiseaux. De toute façon, la vérité, c’est comme la fin du monde. J’y suis allé, moi, à la fin du monde. Seulement, il ne faut pas croire, il n’y avait rien, après.

 

10 commentaires:

  1. Je me disais bien que tu avais déjà mangé de ce plat. Il y a de vraies différences dans la recette du coup ? Ce n'est pas juste le restaurant qui change, tu as senti de nouveaux ingrédients ?

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    1. Je n'ai pas fait de lecture comparés, ce sont surtout des petits changements dans la tournure des phrases. Et je crois aussi que la partie sur la mère est différente.

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  2. Mais du coup qu'est-ce qui a changé? Plus d'épices? J'ai beau détester les brocolis moi aussi, je reste tentée d'y gouter

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    1. J'avais encore quelques mots en tête de l'ancienne éditeur, et je suis conservateur. Mais cela ne change pas grand chose, sauf que le livre a une deuxième vie et semble rencontrer plus de visibilité et de succès.

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  3. L'amour comparé à des brocolis fallait oser. J'adore ta critique!
    Je n'aime pas la romance.

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  4. Et bien, ça a en tout cas l'air d'être assez original, cette affaire de brocolis ! Belle chronique !

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    1. Merci, je vais cependant aller me faire psychanalyser, car c'est assez bizarre cette histoire de brocolis !

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    2. Les salsifis devraient paraître en octobre 😉

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