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La dernière machine

avril 11, 2024

Jean-Marc De Vos, Autoédition, 2022, 211 p., 5€ epub avec DRM


Parfois, on ne sait pas pourquoi, on a envie de lire un livre avec une couverture moche.
Dans ces cas là, ma destination de prédilection est toujours de me tourner vers mon tenancier préféré Jean-Marc De Vos qui adore faire saigner les yeux de ses lecteurs...

Pitch de l'éditeur : 

14 nouvelles de Science-Fiction, Anticipation, Fantastique, 14 pépites qui renouent avec une SF « plaisir », ambiance Pulp – Old School garantie.
Un recueil où l’auteur ratisse large : tous les lieux imaginables et inimaginables, toutes les époques, toutes les situations. Et puis, il y a toujours une machine.



Mon ressenti :

Dans son intro, l'auteur dit qu'il ne faut pas chercher le sous texte, juste apprécier les histoires. Voyons donc ce que cela donne :

Peur de rien !
Il enfonce le clou ici avec cette mise en bouche, écrite comme une boutade. Et ça marche ! Le pitch ? Un premier contact alien dont il faut trouver un volontaire pour vivre seul durant 20 ans.

Hadès
L'humanité est comme la peste, difficile de s'en débarrasser. On peut voir cela comme de la persévérance, ou de la connerie, ce que semble nous dire l'auteur qui nous conte un futur dans 300 millions d'années où les humains pensent avoir retrouvé le berceau de l'humanité, notre bon vieux caillou. Des humains retrouvent le berceau de l'humanité, la terre. Entre mythe des origines et théorie Gaïa, une nouvelle dont la chute permet à l'auteur de dire son amour de l'humanité. Léger et drôle, un plaisir évident que de lire ce texte.

Ceux d'en bas
Voilà un texte qui rappelle la SF avant qu'elle ne s'appelait ainsi. On suit un maître et son élève dans une ambiance étrange et des sismologues.
Comme jadis, pas de réel intrigue, juste des tranches de vie qui vont se rencontrer. Manque d'originalité ici, j'ai eu l'impression d'avoir déjà lu ce genre de trucs. L'auteur dit avoir rédigé ce texte avant d'avoir lu la nouvelle de Clarke, les feux intérieurs, que je n'ai pas lu...

Bubble City

Des êtres sont découverts dans la haute atmosphère de Jupiter, mais gardent jalousement leur secrets. Un ingénieur va tenter de comprendre leurs mécanismes.
Un texte old school (l'aventure, plus que la véracité scientifique), peut être un peu trop rapide, mais dont le final laisse l'infini des possibles se réaliser.

Hiver sur Martingale
Une planète avec plein de ressources à disposition, le paradis pour une entreprise minière. Mais l'exploitation va mal tourner, la flore ayant une croissance infernale. Toujours dans la même veine, le twist final est splendide

La mère de toutes les peurs
Tel est pris qui croyait prendre
Un scientifique est banni de sa communauté suite à une expérience ratée : bilan des dizaines de morts. Il tente sa dernière chance pour se faire réintégrer dans le sérail auprès d'un collègue. Sur fond d'IA et de peur primordiale, une nouvelle rafraîchissante.

La dernière machine de Reich
Inspiré d'un personnage réel, Wilhelm Reich, un des assistants de Freud qui travaillait sur l'orgasme et mourut en prison...
On suit une équipe de scientifiques spécialisés dans la radioactivité qui doit intervenir suite à la découverte d'un objet étrange radioactif dans le trou du cul du monde.
Une nouvelle malaisante du fait de la réalité et de la réécriture de l'auteur sur un pan de l'histoire. Glaçant.

Exhibition
Une histoire inspirée d'un article de presse où Google avait arrêté d'appliquer des filtres par défaut lors de la prise de selfie à cause de troubles sur la santé mentale. Ce que ne font pas fait ses concurrents.
Marrant, car j'ai remarqué que mon smartphone mettait un filtre lors de la prise de selfie, ce que je trouve dérangeant...
Que se passerait il si tout le monde était retouché ? L'auteur nous invite 100 ans dans le futur où le filtre est la norme, le réel la déviance. Dommage que le final soit banal car le monde décrit est très intéressant et questionnant sur notre besoin de modifier nos apparences. Cela reste un très bon texte.

Haptophobique Transgression
Une sorte de blague potache et grivoise autour d'une phobie. Sans intérêt

George, Notre Sauveur
Une nouvelle pour un concours dont l'une des conditions était de commencer le texte par "lorsque Georges rentra chez lui, ce jour là comme tous les jours, rien ne le préparait à ce qu'il vit en franchissant la porte du salon."
Et l'auteur de nous dire que ce fameux salon n'était plus là, remplacé par le néant. Encore du style old school, à base de voyage dans le temps. Distrayant.

Droit dans le mur
Ici, un homme entend des voix dans son mur. Il semblerait que ce soit des aliens. Une pochade dont la morale pourrait être de ne pas prendre ses vessies pour des lanternes.

La dernière séance
Un informaticien a une idée de génie : et si on inventait une IA capable de produire des films et des séries.
Ecrit avant la vague actuelle de l'IA générative, De Vos nous conte une histoire pleine de Pulp avec une fin des plus réjouissantes que je n'avais pas vu venir.

Bibliotheca Apostolica Vaticana
Un cul bénit scientifique est convoqué chez la plus haute instance, le pape, pour une mission capitale.
Relecture des évangiles à la mode De Vos, qui allie science et religion, pour nous emmener dans un grand bang.

Les Murides
En 2019 paraissait L.ambassadeur, le premier roman de l'auteur. Et sans cette nouvelle, son histoire serait sûrement différente. Comme son récit uchronique qui nous conte un peuple alien dont la planète va disparaitre et tente de trouver un moyen de survivre.
Seul bémol à ce texte, c'est qu'il dévoile le twist du roman. Et que je suis plutôt d'avis que vous remettiez la lecture de cette nouvelle à plus tard désormais que vous êtes arrivés à ma dernière critique de ce recueil. Vous savez donc que l'auteur est un bon conteur, dépensez donc quelques euros pour son premier roman (c'est de l'auto édition, ça coûte moins cher qu'un café sur l'autoroute), appréciez et acheter d'autres livres de l'auteur et enfin, lisez les Murides !

Au final, l'auteur ne nous trompe pas sur la marchandise, une lecture plaisante qui passe le temps. Seul mensonge, j'ai trouvé quelquefois du sous-texte, mais c'est la cerise sur le gâteau. En outre, j'ai bien apprécié que l'auteur ajoute un peu de paratexte avant chaque nouvelle.
Ma plus grosse déception est de ne pas avoir pu me payer un autoédité avec une critique assassine, mais ma probité intellectuelle m'oblige à avouer passer de très bon moment à lire ce Jean Marc De Vos (et sa créativité à pondre des couvertures moches pousse même au respect !)

Cimqa

mars 26, 2024

 

Auriane Velten, Mnémos, 2023, 304 p., 10€ epub sans DRM

 



Nous sommes transportés dans une autre dimension, une dimension faite non seulement de paysages et de sons, mais aussi d’esprits. Un voyage dans une contrée sans fin dont les frontières sont notre imagination : la cinquième dimension !


Pitch de l'éditeur :

Imaginez que le monde ait un jour le hoquet ; des créatures et des objets commencent à apparaître. Imaginez trouver un moyen de faire venir ces choses selon votre désir… jusqu’à susciter l’intérêt d’une équipe de scientifiques.
Imaginez travailler pour la plus grande industrie du divertissement, mélangeant cinéma et imagination. Imaginez recevoir l’opportunité de votre vie, mais continuer à être rongé par l’anxiété. Jusqu’à rêver qu’une petite fille vous offre son aide.
C’est dans ce(s) monde(s) chamboulé(s) par l’apparition de la cinquième dimension, celle de l’imagination, que les destins de Sara et Sarah s’écrivent. Mais comment empêcher que la magie ne devienne qu’une nouvelle source de pouvoir et de profit ?



Mon ressenti :

Dès les premières lignes, la catastrophe est là, la grande majorité de population est victime de vertiges, de perte de la notion de distance et de vision altérée. Plutôt que de nous faire des vignettes sur les conséquences mondiales de ces troubles, l'autrice se concentre sur une mère, tentant désespérément de rejoindre la chambre de sa fille. Me voila ferré ! L'histoire se dédouble alors en deux points de vue, l'une Là-bas (ici) et l'autre Ici (Là-bas), avec deux protagonistes Sara et Sarah... 
 
Un roman atypique, loin des codes du genre et qui fait écho à l'histoire où Sarah doit produire des films selon les attentes du public et non pas selon son imaginaire, son art depuis que l’Événement a bousculé l'humanité. Blockbuster contre film indépendant. L'art est-il mort dès que l'argent entre en jeu ? Alors que bien souvent le traitement du sujet de l'art sans la SF m'emmerde profondément, j'ai pris plaisir à parcourir ses pages qui se concentrent sur ces personnages plutôt que de démontrer au forceps son sujet. Et comme j'adore les récits où l'Histoire nous est contée par les histoires individuelles, j'ai été comblé. 
 
Même si j'aurai préféré en connaître plus sur ce monde, même si j'aurai préféré un peu plus d'explications scientifiques, il faut bien reconnaître que chaque lecteur a son rôle à jouer dans un roman, imaginer les blancs laissés par l'auteur... 
 
L'idée du "repli" m'a rappelé la SF de jadis, celle du merveilleux avec un traitement contemporain. Pour tout vous avouer, j'avais attaqué ce roman il y a quelques mois et il m'était tombé des mains. Cependant, l'histoire continue de faire son chemin dans ma tête, alors... Chaque roman doit être lu au bon moment !
 
Après son premier roman After®, Auriane Velten me confirme son talent, ainsi que sa vision personnelle de la science-fiction. Vivement son prochain texte.

Des Martiens au Sahara : Deux siècles de fake news archéologiques

mars 19, 2024

 

Jean-Loïc Le Quellec, Editions du Détour, 2023, 440 p., 16€ epub avec DRM

 
Il n'y a pas que les romanciers qui ont de l'imagination... 
 

Pitch de l'éditeur : 

Les Martiens sont venus au Sahara pendant la préhistoire ; les hommes ont vécu avec les dinosaures ; les Celtes sont les premiers colons de l’Amérique précolombienne ; on a retrouvé l’arche de Noé ; le matriacat primitif…
Toutes ces histoires ont un point commun : elles sont fausses.
Leurs origines sont passionnantes : elles peuvent être pensées et répandues par des « académiciens naïfs » arrivés en fin de carrière et qui sortent de leur domaine de compétence, rêvées par des « archéologues romantiques » déconnectés des faits, construites par des amateurs un peu dérangés convaincus que leur découverte gêne la science bienpensante, ou montées consciemment par de réels escrocs. Jean-Loïc Le Quellec décortique leur éclosion et leur diffusion. 

 

Mon ressenti :

Des martiens au Sahara ? Encore un livre d'un "spécialiste" qui connait le sens caché de la vie ?
Non... enfin si : le sous-titre enlève tout doute , il sera question de fakenews. Et pour lever tout doute sur la véracité scientifique, les 60 pages de notes et de bibliographie sont bien présentes. Restent plus de 350 pages pour démonter les fakenews archéologiques, dont je ne connaissais même pas la majeure partie ! Quant aux martiens au Sahara, malgré le fait que je sois un amateur de romans de SF, personne ne m'avait prévenu !
Je dois vivre dans une grotte à l'abri des fausses informations ! 
 
Il y a des règlements de comptes (les chercheurs ne sont pas à l'abri des bassesses); des apparitions (du Christ ou de tout ce qui peut être vénéré); de la création et du crétinisme, bref du créationnisme; des géants (dont la fausseté égale l'imagination de leurs auteurs); des pseudosavants (autoproclamé ou scientifiques véritables ayant passé la frontière du paranormal). Même Einstein en prend pour son grade : il a en effet préfacé un livre rempli d'âneries d'Hapgood de 1958 niant la tectonique des plaques.
 
J'avais un peu peur à la lecture de l'introduction, le ton un peu aride, professoral, académique, bref le genre de texte que pond une personne en veste de tweed avec des renforts en cuir au coude et dont le contenu est un peu ardu pour moi. Mais ma crainte fut infondée, le reste est accessible, avec de nombreuses touches de légèreté faisant passer un bon moment de lecture instructive. Provenant en grande partie du blog de l'auteur, cela doit expliquer cette accessibilité. Paru initialement en 2009, c'est pour moi une réédition salutaire en cette époque où les fakenews sont légion (mais ne sont pas l'apanage de nos contemporains, les anciens avaient aussi un très bon ce niveau d'après ces pages).

Un livre qui en creux nous permet de mieux déjouer notre crédulité et de forger notre esprit critique face aux différents médias avides de sensationnalisme.

ChronoInterview : A la quête d'un nouvel opus d'Emmanuel Quentin

février 20, 2024

 
 
Emmanuel Quentin s'est fait discret pendant près de quatre ans sans nous donner beaucoup de nouvelles. Finalement, il a réapparu avec "Qisiose", un texte un peu hermétique, ce qui est logique étant donné que la couverture représente un bocal ! L'atmosphère de "Qisiose" est particulière, surprenante à la première lecture et révélant toute sa saveur lors d'une seconde dégustation. Quel mystère se cache dans ce vase ? L'auteur nous dévoile l'origine du texte et de son style singulier.
Reste une question : Pourquoi une interview chrono ? L'auteur ne se cassant pas la tête pour nous offrir un long roman, j'en fais autant ! Pour les gourmands, vous pouvez retrouvez un long entretien ici.



Le chien critique : Le roman Au royaume des vivants en 2020, puis plus grand chose. Rassure-nous, tu es toujours vivant ?

Emmanuel Quentin : Oui, mon pouls fonctionne à merveille !


Ton actualité récente est la sortie de la nouvelle Qisiose, aux éditions 1115. C'est quoi le pitch ?

Qisiose est l’histoire d’un aiguilleur sur une station isolée au fin fond de l’espace qui décide du jour au lendemain de changer d’horizon. Il part en quête de disparitions de défunts dont les répétitions dans toute la galaxie inquiètent au plus haut niveau. Enlèvements ? Machination ? Qisiose s’invente donc chasseur de prime sans se douter un instant de la vérité à laquelle il va se confronter.




Qisiose est le titre et le nom du personnage principal. Tu peux nous expliquer sa signification ?

Lorsque j’ai entamé la rédaction de Qisiose, je sortais de la lecture d’un livre qui m’a profondément marqué : Pereira prétend d’Antonio Tabucchi. J’avais encore dans la tête la musique stylistique de l’auteur et celle-ci collait parfaitement à l’histoire que je projetais pour Qisiose, alors je me suis lancé. C’est la première fois que j’écris, volontairement en tout cas, « à la manière de.. », et c’était un exercice absolument jubilatoire. Enfin, pas vraiment un exercice d’ailleurs, parce que la question ne s’est pas posée en ces termes, car j’ai vraiment été emporté par l’histoire et les péripéties auxquelles Qisiose est confronté. Quant au nom du personnage, et du titre, il s’est très vite imposé. Etant d’une certaine façon comme un miroir à Pereira, j’ai usé de cet artifice que j’utilise parfois pour trouver des noms de personnages. Je prends les consonnes ou voyelles suivantes à un prénom. Ainsi pour cette nouvelle, le P de Pereira est devenu Q, et ainsi de suite : E= I ; R= S ; E=I ; I=O ; R= S ; A=E. De la même manière dans un titre à venir, il n’est pas impossible qu’un certain Marcel devienne un Nesdim. Pas question pour moi de passer par un générateur de noms 😊. Rassurez-moi, je ne suis pas le seul à faire ça, hein ?

Les auteurs m'énervent : ils te donnent une astuce, tu dis super.
Et lorsque tu testes, cela donne le grand n'importe quoi !!!




L'atmosphère de ce texte est particulière, différente de ce que tu nous as déjà offert, même si on y retrouve tes thématiques qui imprègnent tous tes textes. Quelles en sont les raisons ?


Si elle est particulière, je crois que c’est en raison du style justement et de la mécanique qu’il impulse, d’une certaine façon, en lien très étroit avec le propos. Une histoire de respiration, de fuite en avant : celle de Qisiose qui entreprend une longue quête. C’est comme un bourdonnement qui le maintient dans un état particulier et l’empêche de se confronter à son passé, à une vérité profonde. « Le passé, en l’état des choses, ne méritait pas de refaire surface. Le passé ne méritait aucun rappel. »

La réponse à la question : quel est le format d'un texte de la collection ChronoPages ?



Tu bosses pour les Explocréateurs, un projet liant le son, l’image et le texte. Un premier livre augmenté Mutræ a été publié en financement participatif, une exposition a eu lieu qui s'est déroulé fin août début septembre à Montagny Le Bourg. Quelle a été la réception du public ? D’autres lieux où nous pourront voir votre projet Ruines ? Des contacts avec Les Utopiales ou les autres événements SFFF ? Des publications prévues ?

L’expo à Montagny Le Bourg a été quelque chose d’incroyable. Je n’ai malheureusement pas pu m’y rendre mais j’ai vécu ça par procuration, grâce à mes compères Pascal Casolari et Emmanuel Régis. On peut en avoir un petit aperçu ici www.lesexplocreateurs.com (nous gardons toujours des traces... les traces sont l’ADN du #ProjetRuines). Pour la première fois, nous avons créé sons, images et textes en fonction d’un lieu et de son environnement, mais au-delà de cet aspect, cela nous a permis d’échanger avec des personnes incroyables et passionnantes, aussi bien en amont de l’exposition que pendant… et même après. Le public était donc au rendez-vous et naturellement, ça pousse à aller plus loin. Nous n’avons pas encore développé toute la scénographie mais il y a encore beaucoup de choses dans les tuyaux. D’autres rendez-vous se préparent, notamment en lien avec des événements SFFF (pas pour les Utopiales à ce jour, mais qui sait ?). On attend de voir si ça se confirme… To be continued, donc…

Une autre publication ? Pourquoi pas ? Après Mutrae, nous travaillons actuellement autour d’un autre personnage. Elle s’appelle Sonja, c’est une archéologue missionnée sur la planète Cruvire… un univers de glace ! Brrrrr

Mon avis sur le texte paru à l'occasion
Il parait qu'il reste quelques exemplaires...



Début février, ton lieu de travail, la médiathèque l’Alpha d’Angoulême, proposait le film Alien en compagnie de Nicolas Martin. C’est toi qui a monté le projet ? Nicolas Martin ne t’en as pas fait trop bavé ? Le public était content… Dis nous tout !

La rencontre s’est inscrite dans le cadre des Mycéliades Les Mycéliades - Festival SF du 1er au 15 février 2024 - (myceliades.com) un festival de science-fiction national co-piloté par Images en bilbliothèques et l’ADRC (l’agence nationale pour le développement du cinéma en régions). La médiathèque y participait pour la deuxième année consécutive. Pour ma part, j’ai pris contact avec Nicolas Martin au festival Hypermondes et en avant Guingamp, l’invitation était lancée, acceptée, la belle vie, quoi !

Le soir de la projection, nous avons eu une quarantaine de personnes et Nicolas, qui connaît quand même le film plan par plan, séquence par séquence, a mis le feu à la salle. C’était drôle, passionnant, il y a eu une belle interaction avec le public. Bref, un de ces moments qu’on chérit particulièrement en bossant en médiathèque. Et qu’on espère bien renouveler… Nicolas, reviens ! 😊 (je crois que ça répond à ta question de savoir s’il ne m’en a pas trop fait baver ^^).



Il y a un an, tu nous parlais de tes projets en cours :

cela fait quelque temps que je suis sur mon prochain roman, mais comme je le disais, je suis assez lent. […] C'est une histoire qui me tient vraiment à cœur. […] J'ai aussi une nouvelle sur le billard et une novella dont les contours se dessinent petit à petit. Je laisse tout ça mûrir en sourdine. Cette dernière histoire a pour volonté de faire peur...
La nouvelle doit être Qisiose. Et le reste ? Quels sont tes projets en cours ?

Je suis assez lent, en effet, mais j’ai tout de même mis le point final au roman, Vent Rouge, qui paraîtra au deuxième semestre de cette année aux éditions Critic (Ô joie !) (note du chien : on en parle un peu sur Just a Word). Pour la nouvelle tu avais vu juste, c’était donc Qisiose. En ce qui concerne la novella, A l’abri des regards, je l’ai terminée aussi. En voici les premières lignes :

Au moins, on ne peut pas leur reprocher d’avoir manqué de constance. Après avoir omis de m’inviter à leur mariage l’année de mes quinze ans, mes parents ont trouvé le moyen de m’écarter de leur enterrement. Entre ces deux événements, de longues plages de silence entrecoupées de cartes postales – jamais de lettres – aussi froides qu’insipides. Le degré 0,1 de l’amour filial.

Pas d’édition prévue à ce jour pour ce titre. On verra, je me suis beaucoup amusé à l’écrire, surtout les scènes qui font peur… 

En ce qui concerne les projets en cours, il y a bien sûr la poursuite du travail avec les Explocréateurs, un roman de SF entamé comme d’habitude en mode diesel, mais qui pourrait bien se voir dépasser par un polar (depuis le temps que je tourne autour du genre, je vais bien finir par me lancer complètement). Celui-ci, ô surprise, commence par la découverte d’un corps. Mais pas n’importe quel corps… voilà, je laisse le suspens agir, rendez-vous dans douze ans :D.

Ah, si, il y a bien aussi une autre idée qui revient régulièrement. Avec un vaisseau. Très original pour un roman de SF, n’est-il pas ? 


Note du chien : J'ai eu la chance de lire A l'abri des regards en avant première, voici en quelques mots mon ressenti

 

Et voilà, c'est déjà fini. Mais comme dis plus haut, vous pouvez retrouvez un long entretien ici.

 

Son compte Twitter : https://twitter.com/QUENTINEmmanue5

Une interview de 2019 sur ActuSF : Emmanuel Quentin, ses projets 2019

Une interview vidéo de 2018 : Interview de Emmanuel Quentin à Gres'Imaginaire

Le projet Mutrae sur Actusf

Le site des ExploCréateurs : www.lesexplocreateurs.com

Mes avis sur les livres d'Emmanuel : Mes avis





Retour sur Mars

février 15, 2024

 

Ben Bova, Fleuve noir/ Pocket, 2005, 704 p., épuisé

 

Exploration ou exploitation ?

 

Pitch de l'éditeur : 

Six ans après les premiers pas de l'homme sur Mars, le géologue Jamie Waterman, mi-Anglais, mi-Navajo, ne peut résister au magnétisme que la mystérieuse planète exerce toujours sur lui. Capitaine de la seconde équipe d'exploration, il doit mener à bien la mission scientifique qui lui incombe, malgré les intérêts qui l'opposent à Dex Trumball, le fils du milliardaire qui finance l'expédition. Mais il y a beaucoup plus en jeu que les sentiments personnels de Jamie et la sécurité de ses équipiers. Ce monde hostile et énigmatique dissimule encore d'incroyables secrets — comme cette construction improbable perchée sur une falaise, que Jamie a aperçue lors de son premier voyage sur la planète rouge...



Mon ressenti :

Après un Mars excellent, je ne pouvais que poursuivre avec ce Retour sur Mars. Après une ellipse sur le retour de la première mission, la seconde démarre tout aussi vite. Mais après quelques pages, le soufflé retombe assez vite. Alors que le premier roman était "science based", cet opus oublie très rapidement le réalisme pour nous offrir moultes rebondissements. Làs, ces derniers jouent surtout sur les relations entre les personnages, sexuelles bien entendu. Loin de moi que de penser qu'un voyage de deux ans doit se passer sans sexe, mais ici, on dirait que c'est le ressort principal de l'intrigue. Nous connaissons le dicton "ils ne pensent qu'à leurs bites" c'est bien le cas ici, même si les femmes ne sont pas en reste...

Dans cette seconde mission, c'est le privé qui finance, mais le principal financeur est une caricature de lui même, il ne pense qu'au fric et son fiston aussi, qui a réussi à avoir une place pour le voyage. La tension dramatique est donc le méchant est il aussi méchant qu'il en a l'air ? Bref, un ressort dramatique qui ne m'a guère subjugué. Le programme part à vau l'eau sans trop inquiéter, chacun fait ce qu'il veut en fonction de son pouvoir et de ses envies, en dépit du bon sens.

Ben Bova a assez de talent pour me faire tourner les pages assez vite, mais la déception demeure : où est le réalisme que j'avais tant aimé dans le premier tome ? Même la découverte extraordinaire qui arrive au milieu m'a semblé bien trop peu probable, jetant le discrédit sur le réalisme encore un peu plus.

Reste le sujet de l'exploitation commerciale de Mars en l'ouvrant au tourisme (nous sommes dans un avenir récent ou certaines zones de la lune sont habitables). Mais même ici, c'est fait de manière assez caricaturale. Cela ne m'empêchera pas de continuer à explorer la biblio de l'auteur, en particulier son cycle sur le système solaire.

Ellipses

février 06, 2024

 

Audrey Pleynet, recueil auto-édité, 2019, 157 p., 1.50€ epub avec DRM

 

Audrey Pleynet s'est fait connaître il y a quelques années par une nouvelle Citoyen+ et ce recueil en autoédition. Aujourd'hui Le Bélial lui fait confiance en publiant sa novella Rossignol (Prix Utopiales 2023) et son nom circule de plus en plus dans des anthologies. J'avais aussi lu son premier roman Noosphère, que je n'avais pas aimé. Ce recueil avait malgré tout bonne presse, pour une somme plus que modique, quoi de mieux que de s'y plonger avant d'aller observer un rossignol.


Les reines de Cyanira
La reine est morte, vive la reine. Mais cette dernière n'a pas le don de ses aïeuls, ce qui pourrait coûter la vie à son peuple.
Deux manières de commencer un recueil, soit mettre la plus nulle en premier, pour doucement, mais sûrement happer le lecteur dans une progression hyperbolique. Soit commencer par la meilleure histoire et frapper le lecteur par tant de talent. Ayant été très mitigé sur ces reines, j'espère que c'est la première hypothèse qui est la bonne... Même si l'autrice arrive à créer des personnages crédibles, l'intrigue est bien trop convenue et le twist éculé (alors que je suis très bon public ou pour le dire autrement assez con).


Tu t'en souviendra ?
Dans un monde en déliquescence, une tueuse à gages poursuivie par un gang tombe sur une fillette, démunie.
C'est important les leçons de choses, même si apprendre à connaître le fonctionnement du monde est différent d'apprendre à y survivre. Et lorsque l'élève dépasse le maître que se passe-t-il ? Peu de pages, mais l'univers est bien présent, la tranche de vie réaliste. Reste cependant un manque d'émotions pour tout à fait m'emporter.


Les questions que l'on pose
En d'autres temps pas si lointains, les choses étaient assez simples : une dénonciation, la fréquentation d'un lieu de culte, un nom suffisait pour te signaler. Et l'on pouvait s'en arranger, falsifier, les portes de sortie existaient. Mais aujourd'hui dans la même situation, que se passerait-il ?
C'est la question que pose Audrey. Le texte nous met dans la peau d'une IA qui analyse des données. Au début, rien de franchement tendancieux, ce que tu aimes, ce que tu aimerais et ce que tu pourrais aimer. Du marketing 2.0. mais face à l'afflux de bases de données et leur interconnexion, les possibilités de poser des questions et d'avoir des réponses peuvent servir de multiples façons.
Brillant, un texte qui fait froid dans le dos. Brrr


Dolores
Une idée brillante est elle toujours une bonne idée ?
Le bien être des patients, une cause noble. Et l'idée de diminuer leur souffrance en la partageant. Une idée altruiste qui va vite démontrer ses faiblesses et servir les intérêts autres que ceux des malades.
Un très bon texte qui prend de l'ampleur au fil des pages. Peut être juste une seconde partie trop démonstrative, et un peu rapide qui jure avec la sensibilité des premières pages et un final moins réaliste. Mais Audrey parvient à explorer de nombreuses thématiques et conséquences de son idée, c'est déjà pas si mal.


Icône
Arsène est laid et capture la beauté de ce qui l'entoure. Il est photographe. Mais qu'est-ce que la beauté ?
Une fable sur la chirurgie esthétique et la question du beau. La chute est délicieuse.


Alchimistes du rêve
Lorsque le rêve enchante le présent.
Dans un monde, il est possible de façonner son environnement via le couple veilleur alchimiste. L'un rêve, l'autre guide. Un duo excelle, mais ce n'est pas au goût de tous. Tandis que le rêve enchante le présent, l'amour déplace les montagnes. Trop gnangnan comme concept pour moi, j'ai l'impression que l'autrice reste en surface sans aucune thématique spécifique.


Tu étais pourtant si fier de moi
Un manque d'originalité pour moi, dans cet univers post apo ou un "père" s'occupe de sa fille. Sur la thématique du monstre, j'ai déjà lu mieux, cela manque d'épaisseur et d'un twist moins convenu.


Citoyen +
Tous pareils !
C'est par cette nouvelle que j'ai fait la connaissance d'Audrey Pleynet. Qui démontre qu'un texte court peut contenir un univers entier. L'intrusion technologique dans la vie privée, c'est un sujet rebattu, mais l'autrice parvient à le prendre de travers et nous offrir un magnifique twist. Un bijou d'orfèvrerie littéraire.

 

Conclusion, Audrey Pleynet est talentueuse : elle excelle aussi bien dans le très très mauvais et le très très bon ! Certains auteurs nous agacent en n'écrivant que des pépites (qui a parlé de Robert Charles Wilson ?), Audrey nous démontre qu'elle est humaine, et cela fait énormément de bien à mon ego !!!

Quand on eut mangé le dernier chien

janvier 09, 2024

Justine Niogret, Au Diable Vauvert, 2023, 220 p., 5€ epub sans DRM

 
Ce n'est pas parce que l'on mange du chien que l'on éprouve pas un mal de chien à traverser l'Antarctique !

 

Pitch de l'éditeur : 

Il n’existait pas de mots pour en parler, puisque les mots étaient une façon de communiquer entre les Hommes et que le Sud était par essence totalement inhumain. Il s’agissait d’une vie étrangère, une vie de glaces, de minéraux et de vents.
C’était un voyage au bout duquel il n’y avait rien. On ne pouvait se risquer dans cet espace que pour un court instant et on savait que l’on marchait non pas dans la mort, car la mort est une action, un fait, mais plus exactement dans un endroit où il était impossible de vivre.


Mon ressenti :



1912, trois explorateurs partent en expédition en traîneaux en Antarctique.

Le titre ne laisse pas de doute, ce voyage scientifique va mal se terminer. Inspiré d'un fait réel, Justine Niogret nous conte leur lutte quotidienne pour survivre face au grand blanc. Il y a plus d'un siècle, les conditions de voyage n'étaient pas les mêmes qu'aujourd'hui, les équipements sont assez sommaires, compensés par la volonté des trois hommes.

Ce court roman ne se concentre pas sur l'aspect scientifique de l'expédition, mais sur la lutte acharnée de l'homme contre la nature et aussi lui-même. Qu'est ce qui pousse à se surpasser, à ne pas jeter l'éponge et se laisser doucement emporter par le froid ?
 
Mertz et Ninnis au début du voyage

Avant de lire ce livre, je ne connaissais que vaguement cette histoire. Blotti confortablement sous ma couette avec un bol de chocolat chaud, j'ai été captivé par cette aventure tragique, dévorant d'une traite les courts chapitres, marquant un compte à rebours funeste, peignant leur quotidien de voyages glacés, de nourriture inhabituelle et de repos dans des vêtements humides.

En définitive, cette lecture donne envie d'approfondir le sujet, signe indéniable d'un excellent roman.

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